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Déchets

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

La société EcoDDS, éco-organisme de la filière des déchets diffus spécifiques ménagers, a demandé l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 27 novembre 2020 n°2020-1455 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs (REP), pris pour application de la loi AGEC.

Par une décision du 10 novembre 2023 n° 449213, publié au Journal Officiel n°0264 du 15 novembre 2023, le Conseil d’Etat a confirmé la solidité juridique du régime de la responsabilité élargie du producteur (REP) en apportant certaines précisions utiles (I).

Un des moyens présentés a cependant été retenu par le juge, relatif au mandat de représentation des producteurs (article R. 541-174 du code de l’environnement). Son annulation emporte des conséquences importantes immédiates pour les éco organismes (II).

I. Les dispositions conformes à la loi

La redevance versée à l’ADEME. Elle n’est pas une condition financière préalable au sens de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Les missions de suivi de l’Ademe sont également conformes à la loi AGEC.

La résorption des dépôts sauvages. Il revient au cahier des charges de chaque éco-organisme de prévoir au cas par cas si les coûts de ramassage et de traitement des déchets illégalement abandonnés sont pris en charge. Par ailleurs, ce dispositif ne méconnait pas les dispositions du TFUE relatives aux restrictions quantitatives, ni les objectifs de la directive Déchets s’agissant des couts nécessaires à la gestion des déchets.

Les garanties financières en cas de défaillance. Un dispositif financier a été créé pour garantir la continuité du service des éco-organismes (art R. 541-119 du code de l’environnement). Le terme « défaillance » est interprété de manière large, englobant toutes les situations pouvant compromettre la continuité du service public de gestion des déchets, tels que l’arrêt de l’activité, le non-renouvellement de l’agrément, ou des événements imprévus.

La consultation de l’Autorité de la concurrence n’était pas nécessaire, car les contrats types et l’uniformité des contributions n’entravent pas le libre choix des producteurs en matière de prix ou de conditions de vente.

La possibilité de prendre en charge les frais de mise en place des éco-organismes via les éco-contributions. Le Conseil juge que les frais de mise en place (le plus souvent engagés lors du dossier de candidature à l’agrément) peuvent être couverts par l’écocontribution au même titre que les frais de fonctionnement (considérant 47 de l’arrêt). En pratique, cette prise en charge sera rétroactive, puisque les fais de mise en place sont engagés avant l’agrément des éco-organismes.

Le soutien aux collectivités d’outre-mer. Le principe de planification par les éco-organismes est jugé conforme aux dispositions de la directive Déchets. La planification dans les collectivités d’outre-mer, régies par l’article 73 de la Constitution, sera mise en œuvre dans les cas où leurs performances sont inférieures à la moyenne métropolitaine.

Le barème amont. L’article R. 541-110 du code de l’environnement dispose que le cahier des charges peut détailler les modalités d’application du barème amont défini par la loi (L. 541-10-2 code env.). Le Conseil d’État valide cette disposition, au regard de la procédure transparente d’élaboration de ce barème, qui offre des garanties suffisantes et ne portant pas atteinte au principe de « bon rapport cout-efficacité ».

Par ailleurs, les modalités d’agrément des éco-organismes, la création et la compétence des comités des parties prenantes, la modulation de l’écocontribution, le rôle de l’organisme coordonnateur, les modalités d’autocontrôle sont également jugés conformes à la loi.

II. La disposition contraire à la loi : le mandat de subrogation pour les producteurs (art. R. 541-174 code env.)

2.1. Motifs de l’annulation

La société EcoDDS a obtenu l’annulation du décret en ce qu’il introduit l’article R. 541-174 dans le code de l’environnement. Cet article autorisait tout producteur, indépendamment de son origine, à déléguer à un mandataire la responsabilité « d’assurer le respect des obligations liées au régime de responsabilité élargie des producteurs », cette personne serait « subrogée dans toutes les obligations de responsabilité élargie du producteur » dont il acceptait le mandat.

Le Conseil d’État relève d’abord que la directive Déchets prévoit seulement une possibilité de mandat pour les producteurs qui commercialisent sur le territoire national des produits élaborés dans autre Etat (art. 8bis §5 de la directive). Dans ce cas, le mandataire est chargé d’assurer le respect des obligations qui découlent du régime de la REP.  La directive souligne en outre que les Etats membres peuvent définir d’autres exigences, telles que l’enregistrement l’information et la communication des données qui doivent être remplies par le mandataire, afin de suivre et de vérifier les obligations du producteur établi à l’étranger.

Ensuite, le Conseil d’État relève que la loi AGEC a partiellement transposé ce point de la directive à l’article L. 541-10 du code de l’environnement, sans mention d’un mandat, et en prévoyant simplement, pour les producteurs, l’obligation de « pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ». La loi aborde ensuite la mise en place d’éco-organismes agrées auxquels les producteurs transfèrent leur obligation en contrepartie d’une contribution financière.

Ainsi, d’une part, seul le décret transpose cette disposition de la directive, et, d’autre part, selon des modalités singulièrement différentes. En effet, l’article R. 541-174 du code de l’environnement résultant du décret prévoit que le mandat :

  • est permis à tous les producteurs (produisant en France ou à l’étranger)
  • et qu’il emporte une subrogation intégrale dans les obligations du producteur

Ce qui a une portée beaucoup plus large qu’un simple mandat au sens du droit des obligations (art. 1346 et suivants du code civil). La responsabilité attachée à un mandat classique (articles 1984 et suivants du code civil) est plus limitée. Ainsi, dans le cas du mandat avec subrogation, le mandataire doit répondre des obligations du mandant vis-à-vis des tiers. Par exemple les pénalités contractuelles dues aux éco-organismes. Au contraire, dans le cas du simple mandat, le mandant est responsable des actes du mandataire (la responsabilité du mandataire ne pouvant être engagée envers les tiers que dans le cas où il méconnait le mandat).

Les conclusions du Rapporteur public, Nicolas Agnoux, permettent d’éclairer l’arrêt sur ce point : « Ces dispositions entretiennent ainsi une confusion entre la possibilité, prévue au paragraphe 5 de l’article 8 bis de la directive, de désigner un simple « mandataire » chargé d’agir au nom et pour le compte du producteur, sans transfert de responsabilité, conformément à la définition qu’en donne le code civil (art. 1984 et 1998) et un régime de subrogation entraînant, comme l’indique la deuxième phrase de l’article, un transfert de la responsabilité élargie du producteur. Or cette seconde hypothèse apparaît non seulement contraire à la directive (CE, 13 juillet 2006, 281231) mais également entachée d’incompétence en ce qu’elle régit les obligations civiles des opérateurs ».

Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que le pouvoir règlementaire a excédé sa compétence. L’article R. 541-174 du code de l’environnement est annulé dans son intégralité et immédiatement, sans effet différé.

2.2. Conséquences de l’annulation

Le fondement réglementaire de la subrogation intégrale ayant disparu avec l’annulation de l’article R. 541-174 code env., les mandats passés sont a minima devenus inopposables à l’administration sur ce point (cad les dispositions contractuelles désignant les mandataires des producteurs comme interlocuteurs « exclusif » de l’éco-organisme).

L’annulation emportant en outre des effets rétroactifs, l’article est censé n’avoir jamais existé, ce qui peut nécessiter une reconstitution du passé par l’administration. Cela peut donc également remettre en question les poursuites engagées et les sanctions déjà infligées à des mandataires en lieu et place des producteurs (les pénalités au titre des dispositions contractuelles spécifiques à chaque éco-organisme mais aussi au besoin les amendes administratives tel que prévu à l’article L. 5421-10-11 code env.). En cas de préjudice (risque de remboursement notamment), la responsabilité de l’État pourra être engagée.

Pour mémoire, en faisant reposer la responsabilité sur les épaules du mandataire, le décret d’application de la loi AGEC partait d’une bonne intention, consistant à faciliter les possibilités de poursuites vis-à-vis de producteurs situés à l’étranger en cas de dysfonctionnement.

De ce fait, désormais, si un producteur établi à l’étranger importe sa production en France, il est seul soumis au régime de la responsabilité élargie du producteur. Dans la mesure où il méconnaitrait ses obligations, l’éco-organisme doit le poursuivre directement et pas son mandataire.

Un mandat simple de représentation demeure possible. De même les cas particuliers ou des groupes ou maisons mères sont désignés mandataires par leurs filiales doivent pouvoir être pris en compte par les eco-organismes, y compris avec une responsabilité solidaire si elle est librement consentie.

2.3. Suites possibles

Une solution serait que le législateur vote une disposition reprenant les termes de l’article R. 541-174 du code de l’environnement, à savoir la possibilité d’un mandat avec subrogation intégrale pour les producteurs, sous réserve de sa conventionnalité et de sa constitutionnalité. Elle ne sera cependant valable que pour l’avenir, sans effets rétroactifs.

Loi industrie verte : quelles nouvelles mesures ?

Loi industrie verte : quelles nouvelles mesures ?

La loi industrie verte a récemment été adoptée de manière définitive par les deux assemblées. Elle répond à deux objectifs : l’implantation de nouvelles industries vertes et la décarbonation des industries existantes.

Quels enjeux ?

Renouer le « dialogue avec les industries », qu’appelait déjà de ses vœux Robert Poujade en 1975, premier titulaire du portefeuille de ministre de l’environnement, afin de réconcilier croissance et nuisances. La nouvelle loi ambitionne de répondre à cet enjeu via l’économie circulaire et la croissance verte.

Concrètement, quelles mesures ?

Le recours à l’outil de la planification. L’article 1er de la loi dispose que les objectifs de développement industriel seront fixés dans le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDET). Ainsi, les objectifs en matière de décarbonisation et d’implantation d’industries vertes seront adoptés au niveau local afin de mieux prendre en compte les spécificités des régions.

Le développement de l’économie circulaire. La sortie de statut de déchet est simplifiée : La loi pose le principe que les produits fabriqués à partir de déchets ne prennent pas le statut de déchet. Cette simplification contribue au passage d’un contrôle de l’administration non plus ex ante mais ex post (nouvel art. L541-3-4 et L541-4-5 du code de l’environnement).

Le financement de l’industrie verte. Toutes les générations sont invitées à financer la décarbonation des entreprises. Les plus jeunes via le plan épargne avenir climat, ainsi que les seniors via l’assurance vie et les plans épargnes retraite.

Nota : Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit également un crédit d’impôt investissement « industries vertes », pour encourager les entreprises à investir dans les technologies de la décarbonation (pompe à chaleur, photovoltaïque, éolien, batteries et hydrogène).

La prise en compte de critères environnementaux dans la commande publique. Les opérateurs économiques qui ne respecteraient pas leurs obligations d’établir un bilan des émissions de gaz à effet de serre (notamment entreprises de plus de 500 employés- art. L229-25 code env.) seront exclus de l’accès aux marchés publics (nouvel art. L2141-7-2 du code de la commande publique).

La loi cherche donc à fluidifier les relations entre les acteurs tout au long du cycle de vie des entreprises, depuis l’implantation des industries vertes jusqu’à la simplification de la sortie de statut de déchet.


Déchets résiduels : inconstitutionnalité de l’obligation d’acceptation dans les centres de stockage

Déchets résiduels : inconstitutionnalité de l’obligation d’acceptation dans les centres de stockage

Suite à un recours de la Fédération Nationale des Activités de Dépollution et de l’Environnement (FNADE), le Conseil Constitutionnel a été saisi de la constitutionnalité de l’obligation faite aux exploitants d’établissement de stockage d’accepter prioritairement les déchets résiduels issus du réemploi, du recyclage et de la valorisation.

Par une décision n° 2021-968 QPC du 11 février 2022, il a jugé que cette disposition de la loi AGEC portait une atteinte disproportionnée au droit au maintien des conventions légalement conclues.

I. Contexte

L’élimination des déchets (enfouissement dans les centres de stockage), est le dernier échelon de la hiérarchie des modes de traitement. La règlementation européenne (Directive n° 2008/98/CE du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives), reprise en droit national à l’article L. 541-1 du Code de l’environnement (C. env), impose ainsi un ordre de priorité de mode de gestion des déchets : 1°) Prévention et réduction des déchets ; 2°) Réemploi ; 3°) Recyclage ; 4°) Valorisation ; 5°) Elimination.

Les déchets faisant l’objet d’une élimination sont composés à la fois des déchets dit ultimes, destinés directement à l’élimination et des déchets dit résiduels, issus des différents modes de traitements privilégiés (réemploi, recyclage et valorisation : par ex. refus de tri, mâchefers non-valorisables…).

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (dite loi AGEC) a pour objet d’améliorer la gestion des ressources et des déchets, notamment en mettant l’accent sur la réparation et le réemploi des produits, ainsi que sur le recyclage des matériaux.

Elle a créé l’article L. 541-30-2 du C. env qui accorde une priorité d’accès aux centres de stockage des déchets, pour les déchets résiduels. La loi ajoute que l’exploitant du site d’enfouissement n’est pas autorisé à pratiquer, pour ces déchets, des prix supérieurs aux prix habituellement facturés (Rapport d’information déposé en application de l’article 145-7 alinéa 1 du règlement, par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur la mise en application de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, n° 3386 , déposé le mercredi 30 septembre 2020). Enfin, l’article interdit toute indemnisation de l’exploitant de l’installation de stockage et de ses cocontractants.

C’est dans ce contexte, qu’à l’occasion d’un recours en annulation du décret n° 2021-838 du 29 juin 2021 d’application de l’article L. 541-30-1 du C. env, la FNADE a déposé une question prioritaire de constitutionnalité contre cet article.

En effet, si ce dispositif contribue au développement de l’économie-circulaire, il conduit à remettre en cause les contrats par ailleurs conclus par les exploitants de centre d’enfouissement de déchets avec d’autres partenaires, privant ces derniers des garanties de traitement de leurs déchets.

Le mieux n’est-il pas l’ennemi du bien ? C’est ce qu’ont jugé les sages du Conseil Constitutionnel.

II. Une atteinte manifeste au droit au maintien des conventions légalement conclues

2.1. Dans le cadre du recours contre le décret d’application de la loi, le rapporteur public Olivier Fuchs a proposé à la formation de jugement de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel. La liberté d’entreprendre est composée de deux volets : liberté dans la conclusion des contrats et droit au maintien des conventions légalement conclues. Or, selon Olivier Fuchs, l’article L. 541-30-2 portait atteinte à la liberté contractuelle en ce qu’il peut avoir pour effet, d’une part, d’obliger les installations de stockage d’entretenir des relations contractuelles non désirées, et d’autre part, d’empêcher de respecter des engagements contractuels préalables. De plus, la liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre entretenant des liens étroits, il y avait selon lui lieu d’admettre que la question de l’atteinte à la liberté d’entreprendre était sérieuse.

Par une décision de renvoi n° 448305 du 3 décembre 2021, les juges ont suivi le sens des conclusions du rapporteur public. La décision de renvoi du Conseil d’Etat est concise et se contente de relever que « le moyen tiré de ce que l’article L. 541-30-2 du code de l’environnement méconnaît la liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre présente un caractère sérieux ».

2.2. Dans sa décision n° 2021-968 du 11 février 2022, le Conseil constitutionnel a jugé que l’article L. 541-30-2 du C. env portait atteinte au droit au maintien des conventions légalement conclues en ce qu’au vu de la saturation des installations de stockage, il est « susceptible de faire obstacle à l’exécution des contrats qu’ils ont préalablement conclus avec les apporteurs d’autres déchets ».

Mais il souligne que cette atteinte étant motivée par la poursuite de « l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement », elle pourrait être justifiée si elle n’était pas disproportionnée.

Tel n’est pas le cas ici, le Conseil relevant les raisons pour lesquelles l’atteinte est manifestement disproportionnée par rapport à l’objectif poursuivi:

1.. la loi impose la reprise des déchets mêmes quand il n’y a pas de difficulté de traitement de ces déchets ;

2. l’obligation de prévenir au moins 6 mois avant la réception des déchets ne permet pas de prévenir l’impact sur les autres contrats de l’exploitant des installations de stockage ;

3. toute indemnisation étant interdite, les autres partenaires de l’exploitant de l’installation ne pourront pas obtenir réparation si leur contrat ne peut pas être exécuté.

En conséquence, le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur avait porté une atteinte disproportionnée au droit au maintien des conventions légalement conçues.

L’article L. 541-30-2 du Code de l’environnement étant jugé inconstitutionnel il n’est plus applicable à compter de la date de publication de la décision, c’est-à-dire du 12 février 2022. Le Conseil d’Etat doit encore se prononcer sur le recours contre le décret d’application, mais sa censure est certaine.

III. Une autre solution ? la réquisition

L’objectif vertueux de garantir le stockage des déchets résiduels (réemploi, recyclage valorisation) peut être atteint d’une autre façon : en mettant en œuvre le droit de réquisition préfectorale entré depuis plus de 20 ans dans la loi.

La loi 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a créé un 4° à l’article L. 2215-1 du Code des collectivités territoriales (CGCT) donnant, en cas d’urgence, le pouvoir au préfet du département de réquisitionner tout bien ou service nécessaire à faire cesser une atteinte à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publique.

L’article prévoit une rétribution afin de compenser les frais matériels, directs et certains, résultant de la réquisition. Plus précisément, l’article dispose :

« Dans le cas d’une réquisition adressée à une entreprise, lorsque la prestation requise est de même nature que celles habituellement fournies à la clientèle, le montant de la rétribution est calculé d’après le prix commercial normal et licite de la prestation. »

C’est en substance ce que prévoit de façon systématique l’article L. 540-30-2 du C. env quand il estime que le prix de la reprise des déchets doit être le même que celui habituellement facturé pour des déchets de même nature.

Or, par une décision du n° 2003-467 DC du 13 mars 2003 le Conseil constitutionnel a jugé que la réquisition telle que prévue à l’article L. 2215-1 du CGCT était constitutionnelle dans la mesure où elle est suscitée par un besoin.

Ainsi, une obligation de reprise des déchets issus de traitement privilégiés serait constitutionnelle si elle était limitée au ou aux secteurs dans lesquels il y a une difficulté de traitement de ces déchets résiduels.

Malgré la décision du Conseil constitutionnel, cette obligation peut donc toujours être mise en place sur le fondement de l’article L. 2215-1 du CGCT via un arrêté de réquisition dans les départements où les filières de traitement des déchets ont des difficultés pour procéder à leur traitement.

ALTES intervient dans le cadre de la création de l’éco-organisme Cyclevia (REP huiles usagées)

ALTES intervient dans le cadre de la création de l’éco-organisme Cyclevia (REP huiles usagées)

Nouvelles filières REP issues de la loi AGEC.

Les sociétés de la filière « Huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles » qui élaborent, fabriquent, manipulent, traitent, vendent ou importent des produits générateurs de déchets sont soumises au principe de responsabilité élargie du producteur des articles L. 541-10 et suivants du Code de l’environnement depuis le 1er janvier 2022.

Certaines de ces sociétés ont créé l’éco-organisme « Cyclevia » en vue de lui transférer leurs obligations relatives à la responsabilité élargie du producteur. Cyclevia aura alors pour mission notamment de procéder ou faire procéder à la prévention, la récupération, la collecte, au regroupement, à la gestion, à la valorisation et au traitement des déchets issus des produits de la Filière, d’adopter une démarche d’écoconception desdits produits et de favoriser l’allongement de leur durée de vie.

Altes Avocats, avec Carl Enckell, avocat associé, est intervenu en droit de l’environnement ainsi que sur la partie réglementaire.

Pour lire l’article sur Le Monde du Droit c’est ici.

Questions autour d’une filière REP du bâtiment – Assises Nationales des déchets 2019

Questions autour d’une filière REP du bâtiment – Assises Nationales des déchets 2019

Les 15ème Assises Nationales des Déchets se sont déroulées à Nantes les 2 et 3 octobre 2019, dans un contexte législatif actif avec le projet de loi anti gaspillage et économie circulaire.

La synthèse des débats, réalisée par Thierry Meunier, Président de l’Association (Groupe Séché Environnement) est en ligne.

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FAQ : INTÉGRER L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE DANS LE BTP

FAQ : INTÉGRER L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE DANS LE BTP

Elaborée dans le cadre d’une collaboration entre l’Institut Nationale de l’Economie Circulaire et le cabinet Enckell Avocats, cette publication identifie les leviers à mobiliser pour faciliter l’implémentation de l’économie circulaire dans le BTP.

Opérationnel et didactique, ce document traite, sous forme de questions – réponses, un ensemble de thématiques pour réussir son projet d’économie circulaire.

Avec la participation de nombreux partenaires. 

Pour aller sur le site de l’INEC, c’est ici

Pour télécharger la FAQ c’est là :

REP des déchets du bâtiment : le calendrier décalé se précise

REP des déchets du bâtiment : le calendrier décalé se précise

Responsabilité élargie des producteurs de #déchets du #bâtiment : le calendrier se précise et confirme le vide juridique entre :

– la date d’entrée en vigueur « juridique » de la REP, fixée au 1er janvier 2022,

– et son entrée en vigueur opérationnelle, qui interviendra de façon certaine bien plus tard.

1/ Le Ministère de la Transition écologique vient d’engager le 23 novembre 2021, auprès des acteurs intéressés, la phase de consultation restreinte des projets de décret et de cahier des charges de la filière REP bâtiment.

2/ Les parties prenantes ont jusqu’au 8 décembre pour faire part de leurs commentaires.

3/ La consultation publique obligatoire sur le cahier des charges pourra ensuite se tenir (3 à 4 semaines).

4/ De sorte que la publication au Journal Officiel (JO) n’interviendra pas avant janvier 2022.

5/ Les éco-organismes candidats connaitront alors les règles définitives et pourront élaborer leurs dossiers de demande d’agrément accompagnés des documents techniques juridiques (barèmes, contrats d’adhésion, contrat de référencement et de soutien financier, marchés de service…). Ce qui prendra plusieurs semaines/mois à compter de la publication des textes au JO.

6/ A compter de la réception des candidatures (délai indéterminé car aucune règle), le Ministère aura ensuite six mois pour se prononcer (art R 541-87 Code env).

7/ Une fois agrées, le ou les éco-organismes pourront passer les contrats avec les professionnels du déchets (guichet ouvert ou marché de service avec, dans ce dernier cas, de possibles allotissements avec appel d’offre et mise en concurrence) fixant les règles à respecter de part et d’autre (montant du soutien, modalités de la collecte, tri, reporting, soutien aux collectivités territoriales …).

8/ C’est seulement à compter de cette date que le dispositif sera alors pleinement opérationnel, notamment les soutiens financiers

(voir en ce sens le CP du Ministère : https://www.ecologie.gouv.fr/gouvernement-precise-modalites-mise-en-oeuvre-nouvelle-filiere-responsabilite-elargie-des)

Ainsi, le maintien dans le projet de décret d’une date de démarrage de la filière au 1er janvier 2022 interroge.

S’agit-il d’une mesure d’affichage ?

Le Ministère de l’environnement attend-il des metteurs en marché qu’ils mettent en place des systèmes individuels en urgence pour combler les quelques mois de carence ?

Les producteurs de déchets qui répondent aux conditions de la loi et du décret (tri…) pourront-ils prétendre à une gestion ou un traitement sans frais de leurs déchets ? Dans ce cas, qui paiera ? 

Les collectivités territoriales devront-elles continuer à réceptionner sans contrepartie des déchets du bâtiment  dans les déchetteries publiques ?

Les éco-organismes en préfiguration devront-ils pallier à cette situation via une application rétroactive de la REP par rapport à leur date d’agrément ?

En pratique, si une certaine rétroactivité peut-être envisageable, elle implique d’assortir au dispositif déjà fort complexe de la REP Bâtiment des modalités supplémentaires. Ce qui dépend du reste exclusivement du volontariat des metteurs en marché, dans la mesure ou ils ne sont pas responsables de ce calendrier.

Il est compréhensible que l’ambition de la REP bâtiment implique un délai supplémentaire préalable à sa mise en oeuvre; ce que les acteurs intéressés ont du reste demandé depuis l’adoption de la loi AGEC fixant cette date ambitieuse du 1er janvier 2022.

Il est cependant important que chacun comprenne les modalités et les conséquences de ce délai supplémentaire qui, en l’état des derniers  projets en consultation, ne semble pas clairement assumé.

A lire les documents en consultation restreinte :

1/ Le projet de décret de la REP bâtiment  projet décret.pdf

2/ Le projet de cahier des charges de la REP bâtiment Projet CDC REP.pdf

Déchets du bâtiment : La consultation publique du projet de décret REP est terminée

Déchets du bâtiment : La consultation publique du projet de décret REP est terminée

Afin notamment de réduire le nombre de déchets du bâtiment dans les dépôts sauvages, le gouvernement a organisé la création d’une filière de responsabilité élargie du producteur (REP). Ainsi, la loi AGEC, adoptée en 2020, prévoit l’entrée en vigueur de cette nouvelle responsabilité pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB) au 1er janvier 2022.

Pour ce faire, le gouvernement a élaboré plusieurs mesures d’application de cette REP, dans un projet de décret dont la mise en consultation s’est terminée le 26 juillet 2021 (Projet de décret relatif à la responsabilité élargie du producteur pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment).

La consultation publique du cahier des charges de la filière REP doit à présent  commencer.

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Travaux du bâtiment : le gouvernement fixe les conditions du nouveau diagnostic pré-démolition (PMD)

Travaux du bâtiment : le gouvernement fixe les conditions du nouveau diagnostic pré-démolition (PMD)

Par deux décrets n° 2021-821 et n° 2021-822 du 25 juin 2021, le gouvernement vient préciser les conditions relatives au diagnostic dit PMD (gestion des produits, matériaux et  déchets issus du bâtiments).

L’objectif est d’apporter aux acteurs des travaux du bâtiments des règles une méthodologiques permettant de disposer d’une « carte d’identité du bâtiment », soit un document de référence, avec des données fiables et quantifiées. Il améliore le processus de déconstruction sélective, et la traçabilité des matériaux et déchets du bâtiment.

L’ancien diagnostic était critiqué à plusieurs égard : exclusivement relatif aux déchets, il était réalisé dans seulement 5 % des cas.

Le nouveau diagnostic pré-démolition (PMD) doit répondre aux attentes et objectifs en devenant une condition préalable et utile à la bonne mise en œuvre de l’économie circulaire dans le secteur du bâtiment.

Le cabinet Enckell Avocats a été associé à la concertation conduite pour l’élaboration de ce texte, en partenariat avec d’autres parties prenantes. Ce sujet, bien que technique, est indispensable, avec le tri et la traçabilité, à l’essor de l’économie circulaire du bâtiment.

Voici notre analyse des décrets.

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Terres excavées et sédiments : le gouvernement fixe les conditions la sortie du statut de déchet

Terres excavées et sédiments : le gouvernement fixe les conditions la sortie du statut de déchet

Contexte

Les travaux du BTP génèrent chaque année plus de 200 millions de tonnes de déchets et déblais. Afin d’améliorer leur gestion et de renforcer l’économie circulaire, le gouvernement a mis en place un nouvel édifice légal règlementaire depuis la loi LTECV, renforcé par la loi AGEC.

Un arrêté ministériel du 4 juin 2021 sur la sortie du statut de déchets pour les terres excavées et sédiments ayant fait l’objet d’une préparation en vue d’une utilisation en génie civil ou en aménagement, publié au Journal Officiel le 27 juin 2021, fixe les critères permettant à ces déchets de devenir des produits, pour plus grande acceptabilité des matières premières secondaires.

Poursuivant la démarche d’adaptation et de simplification de la prévention et de la gestion des déchets, il complète la règlementation spécifique aux terres excavées et aux sédiments et répond ainsi à une demande de sécurité juridique des professionnels du secteur (notamment pour les terres les acteurs du Grand Paris express, mais aussi pour les sédiments Voies navigables de France).

Ce texte est adopté dans la continuité de trois récents décrets pris en application de la loi AGEC (un décret sur la traçabilité des déchets, un décret sur le contrôle par vidéo des décharges, et un décret sur la sortie du statut de déchet). Ainsi, depuis que la sortie du statut de déchet n’exige plus de recourir à une installation (ICPE ou IOTA), tout producteur ou détenteur peut demander à l’autorité compétente d’en établir les critères.

C’est à ce titre que l’arrêté ministériel du 4 juin 2021 précise les critères de sortie du statut de déchet des terres excavées et des sédiments.  Que faut-il en retenir ?

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FAQ : Intégrer l’économie circulaire dans le BTP

FAQ : Intégrer l’économie circulaire dans le BTP

Elaborée dans le cadre d’une collaboration entre l’Institut National de l’Economie Circulaire et Maître Carl Enckell, cette publication identifie les leviers à mobiliser pour faciliter l’implémentation de l’économie circulaire dans le BTP.

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Opérationnel et didactique, ce document traite, sous forme de questions – réponses, un ensemble de thématiques pour réussir son projet d’économie circulaire.

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Avec la participation de nombreux partenaires. 

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Pour télécharger la FAQ, c’est ICI

Ou ici : https://institut-economie-circulaire.fr/faq-integrer-leconomie-circulaire-dans-le-btp/

Commande publique vertueuse : obligation d’achat de certains biens issus de l’économie circulaire

Commande publique vertueuse : obligation d’achat de certains biens issus de l’économie circulaire

Un décret du 9 mars 2021 pris pour l’application de la loi dite AGEC encourage les achats publics vertueux en instaurant une obligation d’achat de certains biens issus de l’économie circulaire. Il fixe une liste de produits impliquant une part minimale issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage.

Ce décret permet de faire un pas supplémentaire dans le sens d’un verdissement de la commande publique, instrument exemplaire du développement durable.

Le projet de loi Climat et Résilience, dont l’examen a débuté le 8 mars 2021 en commission spéciale, prévoit de poursuivre ce mouvement en renforçant notamment les clauses environnementales dans les marchés publics.

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Vendre ou donner des matériaux de réemploi pour activer l’économie circulaire (Contrats Publics)

Vendre ou donner des matériaux de réemploi pour activer l’économie circulaire (Contrats Publics)

La vente de matériaux de réemploi par des maîtres d’ouvrages publics est selon les cas conditionnée par le respect de certaines règles de publicité de mise en concurrence ou de détermination du prix.

Des moyens sont mis à leur disposition pour sécuriser les transactions afin de limiter les risques d’engagement de leur responsabilité.

Notre article publié dans la revue Contrats Publics dans le cadre d’un numéro spécial consacré à « La commande publique face aux contraintes environnementales » (n° 213 d’Octobre 2020) fait le tour de la question.

Pour lire l’article c’est ici. 

Filière REP et aide d’État : l’avocat général de la CJUE est prudent

Filière REP et aide d’État : l’avocat général de la CJUE est prudent

Les soutiens financiers versés aux opérateurs de tri, déterminés selon le barème aval du dispositif de la REP textile constituent-ils une aide d’État illégale ?

C’est la question à laquelle vont devoir répondre le Conseil d’État et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Au vu du précédent que constitue le dispositif d’obligation d’achat des énergies renouvelables, la qualification d’aide d’État pourrait engendrer des conséquences importantes (risque de remboursement des aides illégales par leurs bénéficiaires ou par l’État si sa responsabilité était avérée).

La réponse est donc très attendue en France jusqu’au plus haut niveau des acteurs économiques, administratifs et politiques.

Le 28 mai 2020, l’avocat général Giovanni Pitruzzela a rendu ses conclusions à la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire C-556/19 relative au dispositif français de responsabilité élargie du producteur (REP) pour la gestion des déchets issus de produits textiles, du linge de maison et des chaussures. 

Pour lire la suite de notre analyse, c’est ICI.

Avis d’expert proposé par Carl Enckell avec la collaboration de Lisa Viry de Enckell Avocats – sur Actu-environnement

Prorogation de l’état d’urgence sanitaire au 10 juillet 2020 : l’environnement n’est pas discriminé par rapport à l’urbanisme !

Prorogation de l’état d’urgence sanitaire au 10 juillet 2020 : l’environnement n’est pas discriminé par rapport à l’urbanisme !

La loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a tracé le cadre des mesures transitoires pouvant être prises par ordonnances par le Gouvernement entre le 24 mars 2020 et le 24 juin 2020 (art 11 I, Loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19), notamment en ce qui concerne les règles de procédures administratives applicables. Le texte a été modifié à plusieurs reprises depuis lors. Les dernières évolutions en matière de délai résultent de l’ordonnance 2020-539 du 7 mai 2020, de la loi n°2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et de l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire.

Désormais, les délais issus de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 inclus (art 1 loi n°2020-546 du 11 mai 2020) ne s’appliquent plus aux autorisations environnementales ni aux autorisations d’urbanisme, qui bénéficient toutes d’un régime spécial.

La cristallisation des délais des projets soumis à autorisations environnementales ou à autorisation d’urbanisme a été décidée dans un objectif de relance de l’économie et, donc, de sécurité juridique. Le Rapport au Président de la République joint à la dernière ordonnance ajoute que les délais fixés correspondent « à la date qu’avaient anticipé tous les acteurs« .

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loi antigaspi et économie circulaire : un calendrier d’application ambitieux en période de crise sanitaire (MTES)

loi antigaspi et économie circulaire : un calendrier d’application ambitieux en période de crise sanitaire (MTES)

Le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire (MTES), autrement dit Ministère de l’environnement, vient de diffuser un calendrier d’application de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite AGEC.

Ce document  met à jour le calendrier d’adoption des textes d’application initialement prévus au premier semestre 2020. Il permet de connaitre par avance un échéancier important pour les parties prenantes concernées par les réformes (collectivités publiques, acteurs économiques, associations et ONG…).

Le planning conserve notamment des échéances parfois très brèves dans le contexte actuel de crise sanitaire. Décryptage.

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Actualisation des règles de procédures administratives pendant la crise sanitaire du Covid-19

Actualisation des règles de procédures administratives pendant la crise sanitaire du Covid-19

La loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19[1] trace le cadre des mesures transitoires qui pourront être prises par ordonnances par le Gouvernement entre le 24 mars 2020 et le 24 mai 2020[2]. Les quatre ordonnances du 25 mars 2020 relatives aux règles de procédure administrative ont déjà été amplement commentées.

Elles ont cependant été modifiées depuis lors par un décret d’application du 1er avril 2020 puis une nouvelle ordonnance du 15 avril 2020. 

  • Adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif

L’ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020[3] permet pour les juridictions administratives de renforcer des formations collégiales incomplètes par des magistrats d’autres juridictions ; d’informer les parties par tout moyen des dates d’audience ; de recourir largement aux télécommunications pour tenir les audiences.

Les procédures d’urgence sont également adaptées. Sont autorisés à statuer sans audience le juge des référés et les cours administratives d’appel sur les demandes de sursis à exécution.

  • Prorogation des délais échus et adaptation des procédures

L’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020[4] autorise le report de l’accomplissement de démarches administratives (acte, formalité, inscription…) quand elles n’ont pas pu être réalisées pendant la durée de l’état d’urgence augmentée d’un mois. Elles pourront l’être après cette période dans le délai normalement prévu et au plus tard dans les deux mois suivant la fin de cette période. L’ordonnance proroge certaines mesures juridictionnelles ou administratives.

Elle précise également la suspension de certains délais pour les relations avec l’administration, essentiellement dans les procédures où le silence de l’administration vaut acceptation.

Cette ordonnance a cependant par la suite été modifiée et complétée par un décret et une ordonnance créant des régimes spécifiques en matière d’ICPE et d’urbanisme.

1/ Ainsi en application du décret n° 2020-383 du 1er avril 2020[5] portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de covid-19, certains délais suspendus reprennent leur cours à compter du 3 avril 2020 compte tenu des enjeux pour la sécurité, la protection de la santé et de la salubrité publique et la préservation de l’environnement (par ex. : délais relatifs à la réalisation de travaux fixés dans les autorisations environnementales ou la sécurité et la sûreté des ouvrages hydrauliques).[6]

2/ De plus, l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de Covid-19[7] publiée au Journal Officiel du 16 avril, prévoit dans son article 8, d’introduire de nouveaux articles à l’ordonnance n°2020-306.

Concernant les délais de recours contre les autorisations d’urbanisme (nouvel article 12 bis de l’ordonnance 2020-306), sont modifiés les délais relatifs aux décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir. On distingue :

  • si le délai a expiré avant le 12 mars 2020, il n’est pas modifié.
  • si le délai expire après le 12 mars 2020, le délai est suspendu entre le 12 mars 2020 et le 24 mars 2020. Il recommence à courir le 24 mai 2020, sans que cette durée puisse être inférieure à sept jours, pour permettre aux justiciables de saisir la juridiction[8].
  • si le délai de recours devait commencer à courir entre le 12 mars 2020 et le 24 mai 2020, son point de départ est reporté au 24 mai 2020.

Concernant les délais d’instruction (nouvel article 12 ter de l’ordonnance 2020-306), sont concernés les « délais d’instruction des demandes d’autorisation et de certificats d’urbanisme et des déclarations préalables […] ainsi que les procédures de récolement« . De plus, «les mêmes règles s’appliquent aux délais impartis aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, aux services, autorités ou commissions, pour émettre un avis ou donner un accord dans le cadre de l’instruction d’une demande ou d’une déclaration mentionnée à l’alinéa précédent. ». On distingue :

  • Si le délai a expiré et produit ses effets avant le 12 mars 2020, il n’est pas modifié.
  • Si le délai expire après le 12 mars 2020, il est suspendu entre le 12 mars et le 24 mai.
  • Si le délai devait commencer entre le 12 mars et le 24 mars 2020, son point de départ est reporté au 24 mai 2020.

Concernant les délais relatifs à certaines procédure de préemption (nouvel article 12 quarter de l’ordonnance 2020-306), ceux-ci sont modifiés dans les mêmes conditions que les délais d’instruction.

Concernant les enquêtes publiques, consultation et participation du public, les dispositions de l’article 12 de l’ordonnance n°2020-306 relatives aux enquêtes publique réalisées pour des projets présentant un intérêt national et un caractère urgent demeurent. Toutefois, l’article 5 de l’ordonnance n°2020-427 modifie l’article 7 de l’ordonnance n°2020-306 : les délais prévus pour la consultation ou la participation du public (à l’exception des enquêtes publiques régies par l’article 12) sont suspendus jusqu’à l’expiration d’une période de sept jours après le 24 mai 2020.

Recommandation : Dans le cadre de projets nécessitant l’obtention de plusieurs autorisations administrations, il convient de prendre en compte les délais, ainsi que les délais du décret du 1er avril 2020[9] créant un régime spécifique pour les ICPE.

Par ailleurs, le rapport au Président de la République[10] indique que la date d’achèvement de ce régime dérogatoire n’est fixée qu’à titre provisoire. Elle méritera d’être réexaminée dans le cadre des mesures législatives de préparation et d’accompagnement de la fin du confinement. Le Gouvernement devra adapter en conséquence la fin de la « période juridiquement protégée » pour accompagner la reprise de l’activité économique et le retour aux règles de droit commun de computation des délais.

  • Mesures d’adaptation des règles de procédure et d’exécution des contrats de la commande publique

L’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020[11] adapte les règles de passation, de délais de paiement, d’exécution et de résiliation des contrats publics, en particulier les règles relatives aux contrats de la commande publique.

Il peut y avoir prolongation des délais des procédures de passation en cours, et aménagement des modalités de mise en concurrence.

Il peut également y avoir prolongation des contrats dont la durée d’exécution arrive à échéance pendant cette période au-delà de la durée maximale indiquée dans le code de la commande publique, et les autorités contractantes sont autorisées à s’approvisionner auprès de tiers malgré d’éventuelles clauses d’exclusivité.

Des mesures sont également prises afin de faire obstacle aux sanctions pouvant être infligées aux titulaires de contrats publics qui ne pourraient pas respecter certaines clauses en raison de l’état d’urgence sanitaire.

Le texte fixe également des règles dérogatoires concernant le paiement des avances et des modalités d’indemnisation en cas de résiliation de marchés publics ou d’annulation de bons de commande.

Par Carl Enckell et Lisa Viry, Enckell Avocats

[1] Loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, publiée au JORF le 24 mars 2020

[2] Art. 4 Loi n°2020-290 du 23 mars 2020

[3] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755612&categorieLien=id et https://www.cnb.avocat.fr/sites/default/files/ordonnance_juridictions_administratives_cnb.pdf

[4] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755644

[5] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041776739&categorieLien=id

[6]https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=0F4F264E1E7578C3A86960643646A390.tplgfr37s_3?cidTexte=JORFTEXT000041776739&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000041776639

[7] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041800899&categorieLien=id

[8] Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19, JORF n°0093 du 16 avril 2020

[9] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041776739&categorieLien=id

[10] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041800867&categorieLien=id

[11] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755875

Parc agrivoltaïque : le tribunal administratif de Dijon permet la régularisation du projet

Parc agrivoltaïque : le tribunal administratif de Dijon permet la régularisation du projet

La société Nièvre Agrisolaire a obtenu trois permis de construire, délivrés par arrêtés du préfet de la Nièvre en janvier 2023 pour l’implantation d’une centrale photovoltaïque au sol comprenant modules, quinze postes de transformation, et un poste de livraison.

Saisi d’un recours formé par des associations, le tribunal administratif de Dijon a rendu son jugement le 26 janvier 2024. Il procède à un recensement minutieux des arguments du dossier, notamment l’étude d’impact, établissant la nature agrivoltaïque du projet. Celle-ci résulte de l’association entre des panneaux photovoltaïques et la production de fourrages agricole de haute qualité incluant un séchoir thermovoltaïque.

Le juge reconnait ensuite des fragilités juridiques mais permet la régularisation du projet via la production d’un complément à l’étude d’impact puis un permis modificatif (jugement TA Dijon, 1re ch., 26 janv. 2024, n° 2300854).

Les communes objet du projet n’ayant pas de PLU, c’est le RNU qui s’applique.

1. Reconnaissance de la nature agrivoltaïque du projet

La question de la nature agrivoltaïque du projet relève au moins autant de la législation de l’énergie que de celle de l’urbanisme.

Ainsi, la définition d’une installation agrivoltaïque est désormais inscrite à l’article L. 314-36 du code de l’énergie, résultant de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (dite APER). Parmi d’autres conditions, la production agricole doit être l’activité principale de la parcelle agricole. La consultation publique du projet de décret d’application s’est quant à elle terminée en janvier 2024.

Les permis de construire objets du jugement du tribunal administratif de Dijon le 24 janvier 2024  sont antérieurs à la loi, ce qui peut expliquer pourquoi il ne s’y réfère pas. En revanche, le jugement procède à un recensement minutieux des arguments du dossier, notamment l’étude d’impact, établissant la nature agrivoltaïque du projet. Le juge administratif recourt ainsi en quelque sorte à la technique jurisprudentielle dite du « faisceau d’indices » :

  • le projet implique le remplacement de cultures céréalières et oléo-protéagineuses exploitées sur les parcelles d’assiette par une production fourragère dite « de haute qualité » répondant aux enjeux du plan dit « K végétales » lancé par le ministre de l’agriculture et de l’alimentation à la fin de l’année 2020.
  • la centrale solaire  « sera construite de façon à permettre le maintien d’une activité agricole au sein des parcelles », avec notamment des distances minimales entre les rangs de modules photovoltaïques adaptées à la circulation des engins agricoles.
  • un séchoir thermovoltaïque dimensionné à l’organisation de l’exploitation assurera la production d’un fourrage séché en grange, d’une valeur nutritive notablement supérieure à celle du fourrage en champs et offrant de meilleurs débouchés commerciaux

Le tribunal relève également que « les ouvrages de production d’énergie et le séchoir concourent à la réalisation d’un même projet […] à savoir la construction d’un parc dit « agrivoltaïque », associant à la production d’électricité celle d’un fourrage » (considérant 13).

Enfin, le tribunal juge que le séchoir thermovoltaïque que la société envisage de construire (bâtiment de 80 mètres) concourt à la qualification de projet agrivoltaïque, dans la mesure où il permettra la production d’un fourrage à proximité du siège de l’exploitation, avec un débouché économique pour l’agriculteur.

Au vu de ces éléments, et alors même qu’il implique un changement du type de culture exercé sur le terrain (75 hectares de maïs), il apparait que la production agricole sera significative par rapport à la production d’électricité.

2. Les arguments rejetés par le tribunal

Le juge rejette les moyens avancés par les requérants s’agissant de l’appréciation satisfaisante et proportionnée des incidences du projet sur les paysages et le patrimoine culturel.

Le tribunal a également rejeté le moyen selon lequel l’étude d’impact serait insuffisante du fait du manque d’estimation des émissions attendus (pollution air eau sol sous-sol) puisque les parcelles concernées font déjà l’objet d’une exploitation agricole intensive.

Les moyens relatifs à l’illégalité de l’enquête publique sont également rejetés, ainsi que celui concernant la dérogation espèce protégée, en soulignant que l’obtention de la dérogation conditionne uniquement la mise en œuvre du permis de construire, mais pas sa légalité.

3. Les arguments accueillis par le tribunal

Le juge accueille néanmoins deux des arguments de procédure avancés par les requérants.

Le premier concerne le périmètre de l’étude d’impact (considérant 14). En effet, le juge rappelle que l’article L. 122-1 du code de l’environnement dispose que tout projet constitué de plusieurs interventions dans le milieu naturel doit être évalué dans son ensemble, même en cas de fractionnement dans le temps et l’espace, afin de comprendre ses incidences environnementales globales.

Le tribunal conclut que la construction du séchoir est nécessaire en raison du changement de type de culture induit par le parc photovoltaïque. Ces deux éléments concourent à la réalisation d’un même projet, qualifié d’agrivoltaïque. Par conséquent, l’étude d’impact aurait dû couvrir l’ensemble du projet, y compris la construction du séchoir.

Il estime que l’absence d’analyse des incidences environnementales du séchoir dans l’étude d’impact constitue une insuffisance préjudiciable à l’information complète de la population.

Le second moyen concerne la notion d’ensemble immobilier unique (considérant 49). L’article L. 421-1 du code de l’urbanisme requiert une autorisation de construire pour toute construction, même sans fondations. Selon l’article L. 421-6, la construction d’un ensemble immobilier unique devrait normalement faire l’objet d’une seule autorisation, sauf si l’ampleur et la complexité du projet justifient des permis distincts. Les requérants reprochent à la société Nièvre Agrisolaire de ne pas avoir inclus le séchoir dans ses demandes de permis, bien que celui-ci soit considéré comme essentiel pour maintenir des activités agricoles significatives sur les parcelles du projet.

Le tribunal affirme que le parc photovoltaïque et le séchoir, bien que distincts du point de vue technique et économique, forment un ensemble immobilier unique en raison de leurs liens fonctionnels et de leur impact sur le maintien des activités agricoles.

L’absence de présentation du séchoir dans les demandes de permis rend donc impossible une évaluation globale par l’autorité administrative du respect des règles d’urbanisme et de la protection des intérêts généraux.

4. Conséquences du jugement

Le juge fait usage de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme  et soumet le projet à régularisation pour chacun de ces deux vices, permettant ainsi de sauver le projet. En effet, s’agissant du périmètre de l’étude d’impact, il demande la production d’un complément à celle-ci. Quant à la qualification d’ensemble immobilier unique comprenant le séchoir, un permis modificatif est sollicité.

L’affaire sera donc à nouveau jugée dans quelques mois une fois la procédure de régularisation accomplie.

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

La société EcoDDS, éco-organisme de la filière des déchets diffus spécifiques ménagers, a demandé l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 27 novembre 2020 n°2020-1455 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs (REP), pris pour application de la loi AGEC.

Par une décision du 10 novembre 2023 n° 449213, publié au Journal Officiel n°0264 du 15 novembre 2023, le Conseil d’Etat a confirmé la solidité juridique du régime de la responsabilité élargie du producteur (REP) en apportant certaines précisions utiles (I).

Un des moyens présentés a cependant été retenu par le juge, relatif au mandat de représentation des producteurs (article R. 541-174 du code de l’environnement). Son annulation emporte des conséquences importantes immédiates pour les éco organismes (II).

I. Les dispositions conformes à la loi

La redevance versée à l’ADEME. Elle n’est pas une condition financière préalable au sens de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Les missions de suivi de l’Ademe sont également conformes à la loi AGEC.

La résorption des dépôts sauvages. Il revient au cahier des charges de chaque éco-organisme de prévoir au cas par cas si les coûts de ramassage et de traitement des déchets illégalement abandonnés sont pris en charge. Par ailleurs, ce dispositif ne méconnait pas les dispositions du TFUE relatives aux restrictions quantitatives, ni les objectifs de la directive Déchets s’agissant des couts nécessaires à la gestion des déchets.

Les garanties financières en cas de défaillance. Un dispositif financier a été créé pour garantir la continuité du service des éco-organismes (art R. 541-119 du code de l’environnement). Le terme « défaillance » est interprété de manière large, englobant toutes les situations pouvant compromettre la continuité du service public de gestion des déchets, tels que l’arrêt de l’activité, le non-renouvellement de l’agrément, ou des événements imprévus.

La consultation de l’Autorité de la concurrence n’était pas nécessaire, car les contrats types et l’uniformité des contributions n’entravent pas le libre choix des producteurs en matière de prix ou de conditions de vente.

La possibilité de prendre en charge les frais de mise en place des éco-organismes via les éco-contributions. Le Conseil juge que les frais de mise en place (le plus souvent engagés lors du dossier de candidature à l’agrément) peuvent être couverts par l’écocontribution au même titre que les frais de fonctionnement (considérant 47 de l’arrêt). En pratique, cette prise en charge sera rétroactive, puisque les fais de mise en place sont engagés avant l’agrément des éco-organismes.

Le soutien aux collectivités d’outre-mer. Le principe de planification par les éco-organismes est jugé conforme aux dispositions de la directive Déchets. La planification dans les collectivités d’outre-mer, régies par l’article 73 de la Constitution, sera mise en œuvre dans les cas où leurs performances sont inférieures à la moyenne métropolitaine.

Le barème amont. L’article R. 541-110 du code de l’environnement dispose que le cahier des charges peut détailler les modalités d’application du barème amont défini par la loi (L. 541-10-2 code env.). Le Conseil d’État valide cette disposition, au regard de la procédure transparente d’élaboration de ce barème, qui offre des garanties suffisantes et ne portant pas atteinte au principe de « bon rapport cout-efficacité ».

Par ailleurs, les modalités d’agrément des éco-organismes, la création et la compétence des comités des parties prenantes, la modulation de l’écocontribution, le rôle de l’organisme coordonnateur, les modalités d’autocontrôle sont également jugés conformes à la loi.

II. La disposition contraire à la loi : le mandat de subrogation pour les producteurs (art. R. 541-174 code env.)

2.1. Motifs de l’annulation

La société EcoDDS a obtenu l’annulation du décret en ce qu’il introduit l’article R. 541-174 dans le code de l’environnement. Cet article autorisait tout producteur, indépendamment de son origine, à déléguer à un mandataire la responsabilité « d’assurer le respect des obligations liées au régime de responsabilité élargie des producteurs », cette personne serait « subrogée dans toutes les obligations de responsabilité élargie du producteur » dont il acceptait le mandat.

Le Conseil d’État relève d’abord que la directive Déchets prévoit seulement une possibilité de mandat pour les producteurs qui commercialisent sur le territoire national des produits élaborés dans autre Etat (art. 8bis §5 de la directive). Dans ce cas, le mandataire est chargé d’assurer le respect des obligations qui découlent du régime de la REP.  La directive souligne en outre que les Etats membres peuvent définir d’autres exigences, telles que l’enregistrement l’information et la communication des données qui doivent être remplies par le mandataire, afin de suivre et de vérifier les obligations du producteur établi à l’étranger.

Ensuite, le Conseil d’État relève que la loi AGEC a partiellement transposé ce point de la directive à l’article L. 541-10 du code de l’environnement, sans mention d’un mandat, et en prévoyant simplement, pour les producteurs, l’obligation de « pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ». La loi aborde ensuite la mise en place d’éco-organismes agrées auxquels les producteurs transfèrent leur obligation en contrepartie d’une contribution financière.

Ainsi, d’une part, seul le décret transpose cette disposition de la directive, et, d’autre part, selon des modalités singulièrement différentes. En effet, l’article R. 541-174 du code de l’environnement résultant du décret prévoit que le mandat :

  • est permis à tous les producteurs (produisant en France ou à l’étranger)
  • et qu’il emporte une subrogation intégrale dans les obligations du producteur

Ce qui a une portée beaucoup plus large qu’un simple mandat au sens du droit des obligations (art. 1346 et suivants du code civil). La responsabilité attachée à un mandat classique (articles 1984 et suivants du code civil) est plus limitée. Ainsi, dans le cas du mandat avec subrogation, le mandataire doit répondre des obligations du mandant vis-à-vis des tiers. Par exemple les pénalités contractuelles dues aux éco-organismes. Au contraire, dans le cas du simple mandat, le mandant est responsable des actes du mandataire (la responsabilité du mandataire ne pouvant être engagée envers les tiers que dans le cas où il méconnait le mandat).

Les conclusions du Rapporteur public, Nicolas Agnoux, permettent d’éclairer l’arrêt sur ce point : « Ces dispositions entretiennent ainsi une confusion entre la possibilité, prévue au paragraphe 5 de l’article 8 bis de la directive, de désigner un simple « mandataire » chargé d’agir au nom et pour le compte du producteur, sans transfert de responsabilité, conformément à la définition qu’en donne le code civil (art. 1984 et 1998) et un régime de subrogation entraînant, comme l’indique la deuxième phrase de l’article, un transfert de la responsabilité élargie du producteur. Or cette seconde hypothèse apparaît non seulement contraire à la directive (CE, 13 juillet 2006, 281231) mais également entachée d’incompétence en ce qu’elle régit les obligations civiles des opérateurs ».

Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que le pouvoir règlementaire a excédé sa compétence. L’article R. 541-174 du code de l’environnement est annulé dans son intégralité et immédiatement, sans effet différé.

2.2. Conséquences de l’annulation

Le fondement réglementaire de la subrogation intégrale ayant disparu avec l’annulation de l’article R. 541-174 code env., les mandats passés sont a minima devenus inopposables à l’administration sur ce point (cad les dispositions contractuelles désignant les mandataires des producteurs comme interlocuteurs « exclusif » de l’éco-organisme).

L’annulation emportant en outre des effets rétroactifs, l’article est censé n’avoir jamais existé, ce qui peut nécessiter une reconstitution du passé par l’administration. Cela peut donc également remettre en question les poursuites engagées et les sanctions déjà infligées à des mandataires en lieu et place des producteurs (les pénalités au titre des dispositions contractuelles spécifiques à chaque éco-organisme mais aussi au besoin les amendes administratives tel que prévu à l’article L. 5421-10-11 code env.). En cas de préjudice (risque de remboursement notamment), la responsabilité de l’État pourra être engagée.

Pour mémoire, en faisant reposer la responsabilité sur les épaules du mandataire, le décret d’application de la loi AGEC partait d’une bonne intention, consistant à faciliter les possibilités de poursuites vis-à-vis de producteurs situés à l’étranger en cas de dysfonctionnement.

De ce fait, désormais, si un producteur établi à l’étranger importe sa production en France, il est seul soumis au régime de la responsabilité élargie du producteur. Dans la mesure où il méconnaitrait ses obligations, l’éco-organisme doit le poursuivre directement et pas son mandataire.

Un mandat simple de représentation demeure possible. De même les cas particuliers ou des groupes ou maisons mères sont désignés mandataires par leurs filiales doivent pouvoir être pris en compte par les eco-organismes, y compris avec une responsabilité solidaire si elle est librement consentie.

2.3. Suites possibles

Une solution serait que le législateur vote une disposition reprenant les termes de l’article R. 541-174 du code de l’environnement, à savoir la possibilité d’un mandat avec subrogation intégrale pour les producteurs, sous réserve de sa conventionnalité et de sa constitutionnalité. Elle ne sera cependant valable que pour l’avenir, sans effets rétroactifs.

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Le Département Infrastructures et Matériaux du Cerema Méditerranée organise une Conférence Technique Territoriale le 12 octobre 2023 :

« Economie circulaire dans le BTP : développements et perspectives sur notre territoire« .

Maitre Rosalie Amabile, responsable du bureau de Marseille du cabinet Altes, y interviendra sur le thème du « Cadre juridique de l’économie circulaire : commande publique et BTP »

Le nombre de places est limité et la conférence aura lieu uniquement en présentiel sur le site d’Aix-en-Provence.

Les inscriptions sont obligatoires et se font par internet via ce lien.