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La participation du public, c’est maintenant ! (chronique Actuel HSE)

par | 4 Oct 2012

participation du public,concertation,projet de loi,actuel hse,chroniqueLa revue en ligne Actuel Hygiène Sécurité et Environnement a bien voulu publier ma dernière chronique consacrée au projet de loi sur la participation du public présenté hier mercredi 3 octobre en Conseil des ministres.

En voici le texte in extenso.

Participation du public : que peut-ont en attendre concrètement du projet de loi ?

Le projet de loi relatif à la mise en œuvre du principe de participation du public a été présenté mercredi par la ministre de l’Ecologie, Delphine Batho. Revenons sur les principales dispositions de ce texte.

Alors que cette question est apparue en Europe seulement à la fin des années soixante-dix (Conférence de Bali en 1977), plusieurs Etats ont déjà adoptés des mécanismes de « codécisions » préalablement à la définition des règles, notamment en matière d’environnement (Suisse, Belgique).

La France a quant à elle transposé ce principe plus récemment, principalement dans la Charte de l’Environnement (2005) et dans le cadre du Grenelle de l’Environnement. Cependant, les modalités d’adoption des décisions administratives n’ont pas encore été toutes adaptées, ce qui les fragilise.

La participation du public : pourquoi encore une loi ?

Plusieurs récentes décisions du Conseil constitutionnel, dont la mission est de garantir la constitutionnalité des lois, ont d’ores et déjà censuré des articles du Code de l’environnement en raison de leur inconstitutionnalité (voir cet article : Arrêtés « types » ICPE : chronique d’une mort annoncée). Motif retenu : les procédures n’associent pas suffisamment le public (par exemple lors de l’élaboration des « arrêtés types » applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement).

Ces décisions témoignent de la fragilité du droit français, dont les règles sont à ce jour élaborées et adoptées sans une réelle participation du public. En pratique, c’est dangereux car cela génère un véritable nid à contentieux permettant de remettre en cause la plupart des textes adoptés depuis ces dernières années en matière d’environnement.

Or, le Conseil constitutionnel a fixé un délai au législateur pour adopter une nouvelle loi définissant de nouvelles modalités de participation du public. : 1er janvier 2013. C’est pourquoi un projet de loi a récemment été diffusé sur le site du Ministère de l’Environnement. Il sera adopté d’ici la fin de l’année.

Que peut-on en attendre concrètement ?

La participation du public : quel objectif ?

L’objectif de la participation du public est de favoriser l’élaboration d’un droit équitable, c’est-à-dire contradictoire, au même titre qu’un procès équitable.

La mise en œuvre de ce principe implique d’offrir au public un temps au cours duquel il pourra se prononcer sur un projet de décision, entre sa conception initiale et son adoption définitive. Les observations formulées par le public sont destinées à permettre d’améliorer le texte en toute transparence.

Ce dispositif est destiné à remplacer/compléter les modalités de participation indirectes à présent mises en œuvre par les acteurs socio économiques et le public (monde associatif notamment) lors de l’élaboration des textes.

La participation du public : pour quelles décisions ?

Le projet de loi diffusé du 11 au 24 septembre sur le site du Ministère de l’environnement concerne les décisions des autorités de l’Etat et de ses établissements publics ayant une incidence sur l’environnement (article L. 120-1 du Code de l’environnement).

Cette terminologie soulève deux séries d’interrogations quant à son champ d’application.

– Tout d’abord, à quelles autorités le principe va-t-il s’appliquer ? Par exemple, les décisions du Conservatoire du littoral, de la Commission national du débat public, de l’Autorité de sûreté du Nucléaire (ASN), de la Commission de Régulation de l’Energie seront-elles concernées ?

– Ensuite, que faut-il entendre par décision ayant une incidence sur l’environnement ? Aujourd’hui, il est reconnu que de très nombreuses décisions peuvent avoir une incidence sur l’environnement (même indirecte). On parle de « grenellisation » ou de « verdissement » du droit de l’urbanisme, mais cela vaut aussi pour l’énergie, la santé, l’agriculture, la consommation, le travail.

Toutes les décisions prises par les autorités de l’Etat dans ces différents domaines devront-elles avoir été précédées d’une concertation dès lors qu’elles peuvent avoir une incidence sur l’environnement ? Sans définition plus précise, ce sera au juge d’en décider en cas de recours et le risque d’interprétation extensive est réel.

La participation du public : Comment et quelles conséquences ?

En pratique, la garantie d’une participation de tout le public conduit à l’utilisation des moyens modernes de communication, c’est à dire d’internet. Le dispositif proposé par la loi ne prévoit pas d’autres modalités telles que des conférences de citoyens ou des réunions publiques par exemple.

Un autre enjeu est celui de la prise en compte des avis exprimés durant la concertation. Or, le projet de loi est à ce titre bien court. Si le délai minimum de consultation du public est de quinze jours (ce qui peut paraître assez bref, notamment en période de fêtes ou de congés), le délai minimum que l’administration doit consacrer à l’analyse des avis exprimés est seulement de deux jours. Ainsi, selon le projet de loi, deux jours après la fin de la consultation, la décision définitive pourra être signée et publiée.

On peut également regretter que rien ne soit prévu pour garantir la prise en considération des observations du public. En l’état, les observations du public sont recueillies sans espace de délibération et sans que chacun ait connaissance du contenu des autres avis exprimés.

Cependant les avis exprimés comme la synthèse faite par l’administration relèvent de « l’information environnementale » et sont à ce titre communicables, notamment en cas de recours devant le juge.

La participation du public : Combien de procédures ?

Enfin, il faut relever que le projet de loi concerne la procédure générale de participation du public, mais réserve la possibilité de déterminer d’autres règles pour des procédures spéciales prévues par la loi (par exemple pour les décisions intervenant dans le domaine de l’eau ou des ICPE).

Dans ce cas, les modalités seront fixées par ordonnance (c’est à dire par le gouvernement). Il faut cependant espérer que les différents textes harmoniseront les mécanismes pour éviter une multiplication des calendriers et des règles.

En définitive, le projet va déboucher sur une loi qui sera votée d’ici la fin de l’année 2012. Loin de répondre à toutes les questions soulevées, ce texte est une première étape dans la progressive mise en place d’une démocratie participative, complémentaire de la démocratie représentative.

L’efficacité du dispositif implique que le public s’en empare et s’exprime lors des procédures de consultation.

Loin de constituer un simple gadget destiné à faire accepter des décisions par les citoyens, le principe de participation est un outil de responsabilisation des décideurs. Il ne considère plus les citoyens en tant que sujets mais en tant qu’acteurs, ce qui devrait faire évoluer les modes d’expression des rapports de force.

 

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

La société EcoDDS, éco-organisme de la filière des déchets diffus spécifiques ménagers, a demandé l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 27 novembre 2020 n°2020-1455 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs (REP), pris pour application de la loi AGEC.

Par une décision du 10 novembre 2023 n° 449213, publié au Journal Officiel n°0264 du 15 novembre 2023, le Conseil d’Etat a confirmé la solidité juridique du régime de la responsabilité élargie du producteur (REP) en apportant certaines précisions utiles (I).

Un des moyens présentés a cependant été retenu par le juge, relatif au mandat de représentation des producteurs (article R. 541-174 du code de l’environnement). Son annulation emporte des conséquences importantes immédiates pour les éco organismes (II).

I. Les dispositions conformes à la loi

La redevance versée à l’ADEME. Elle n’est pas une condition financière préalable au sens de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Les missions de suivi de l’Ademe sont également conformes à la loi AGEC.

La résorption des dépôts sauvages. Il revient au cahier des charges de chaque éco-organisme de prévoir au cas par cas si les coûts de ramassage et de traitement des déchets illégalement abandonnés sont pris en charge. Par ailleurs, ce dispositif ne méconnait pas les dispositions du TFUE relatives aux restrictions quantitatives, ni les objectifs de la directive Déchets s’agissant des couts nécessaires à la gestion des déchets.

Les garanties financières en cas de défaillance. Un dispositif financier a été créé pour garantir la continuité du service des éco-organismes (art R. 541-119 du code de l’environnement). Le terme « défaillance » est interprété de manière large, englobant toutes les situations pouvant compromettre la continuité du service public de gestion des déchets, tels que l’arrêt de l’activité, le non-renouvellement de l’agrément, ou des événements imprévus.

La consultation de l’Autorité de la concurrence n’était pas nécessaire, car les contrats types et l’uniformité des contributions n’entravent pas le libre choix des producteurs en matière de prix ou de conditions de vente.

La possibilité de prendre en charge les frais de mise en place des éco-organismes via les éco-contributions. Le Conseil juge que les frais de mise en place (le plus souvent engagés lors du dossier de candidature à l’agrément) peuvent être couverts par l’écocontribution au même titre que les frais de fonctionnement (considérant 47 de l’arrêt). En pratique, cette prise en charge sera rétroactive, puisque les fais de mise en place sont engagés avant l’agrément des éco-organismes.

Le soutien aux collectivités d’outre-mer. Le principe de planification par les éco-organismes est jugé conforme aux dispositions de la directive Déchets. La planification dans les collectivités d’outre-mer, régies par l’article 73 de la Constitution, sera mise en œuvre dans les cas où leurs performances sont inférieures à la moyenne métropolitaine.

Le barème amont. L’article R. 541-110 du code de l’environnement dispose que le cahier des charges peut détailler les modalités d’application du barème amont défini par la loi (L. 541-10-2 code env.). Le Conseil d’État valide cette disposition, au regard de la procédure transparente d’élaboration de ce barème, qui offre des garanties suffisantes et ne portant pas atteinte au principe de « bon rapport cout-efficacité ».

Par ailleurs, les modalités d’agrément des éco-organismes, la création et la compétence des comités des parties prenantes, la modulation de l’écocontribution, le rôle de l’organisme coordonnateur, les modalités d’autocontrôle sont également jugés conformes à la loi.

II. La disposition contraire à la loi : le mandat de subrogation pour les producteurs (art. R. 541-174 code env.)

2.1. Motifs de l’annulation

La société EcoDDS a obtenu l’annulation du décret en ce qu’il introduit l’article R. 541-174 dans le code de l’environnement. Cet article autorisait tout producteur, indépendamment de son origine, à déléguer à un mandataire la responsabilité « d’assurer le respect des obligations liées au régime de responsabilité élargie des producteurs », cette personne serait « subrogée dans toutes les obligations de responsabilité élargie du producteur » dont il acceptait le mandat.

Le Conseil d’État relève d’abord que la directive Déchets prévoit seulement une possibilité de mandat pour les producteurs qui commercialisent sur le territoire national des produits élaborés dans autre Etat (art. 8bis §5 de la directive). Dans ce cas, le mandataire est chargé d’assurer le respect des obligations qui découlent du régime de la REP.  La directive souligne en outre que les Etats membres peuvent définir d’autres exigences, telles que l’enregistrement l’information et la communication des données qui doivent être remplies par le mandataire, afin de suivre et de vérifier les obligations du producteur établi à l’étranger.

Ensuite, le Conseil d’État relève que la loi AGEC a partiellement transposé ce point de la directive à l’article L. 541-10 du code de l’environnement, sans mention d’un mandat, et en prévoyant simplement, pour les producteurs, l’obligation de « pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ». La loi aborde ensuite la mise en place d’éco-organismes agrées auxquels les producteurs transfèrent leur obligation en contrepartie d’une contribution financière.

Ainsi, d’une part, seul le décret transpose cette disposition de la directive, et, d’autre part, selon des modalités singulièrement différentes. En effet, l’article R. 541-174 du code de l’environnement résultant du décret prévoit que le mandat :

  • est permis à tous les producteurs (produisant en France ou à l’étranger)
  • et qu’il emporte une subrogation intégrale dans les obligations du producteur

Ce qui a une portée beaucoup plus large qu’un simple mandat au sens du droit des obligations (art. 1346 et suivants du code civil). La responsabilité attachée à un mandat classique (articles 1984 et suivants du code civil) est plus limitée. Ainsi, dans le cas du mandat avec subrogation, le mandataire doit répondre des obligations du mandant vis-à-vis des tiers. Par exemple les pénalités contractuelles dues aux éco-organismes. Au contraire, dans le cas du simple mandat, le mandant est responsable des actes du mandataire (la responsabilité du mandataire ne pouvant être engagée envers les tiers que dans le cas où il méconnait le mandat).

Les conclusions du Rapporteur public, Nicolas Agnoux, permettent d’éclairer l’arrêt sur ce point : « Ces dispositions entretiennent ainsi une confusion entre la possibilité, prévue au paragraphe 5 de l’article 8 bis de la directive, de désigner un simple « mandataire » chargé d’agir au nom et pour le compte du producteur, sans transfert de responsabilité, conformément à la définition qu’en donne le code civil (art. 1984 et 1998) et un régime de subrogation entraînant, comme l’indique la deuxième phrase de l’article, un transfert de la responsabilité élargie du producteur. Or cette seconde hypothèse apparaît non seulement contraire à la directive (CE, 13 juillet 2006, 281231) mais également entachée d’incompétence en ce qu’elle régit les obligations civiles des opérateurs ».

Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que le pouvoir règlementaire a excédé sa compétence. L’article R. 541-174 du code de l’environnement est annulé dans son intégralité et immédiatement, sans effet différé.

2.2. Conséquences de l’annulation

Le fondement réglementaire de la subrogation intégrale ayant disparu avec l’annulation de l’article R. 541-174 code env., les mandats passés sont a minima devenus inopposables à l’administration sur ce point (cad les dispositions contractuelles désignant les mandataires des producteurs comme interlocuteurs « exclusif » de l’éco-organisme).

L’annulation emportant en outre des effets rétroactifs, l’article est censé n’avoir jamais existé, ce qui peut nécessiter une reconstitution du passé par l’administration. Cela peut donc également remettre en question les poursuites engagées et les sanctions déjà infligées à des mandataires en lieu et place des producteurs (les pénalités au titre des dispositions contractuelles spécifiques à chaque éco-organisme mais aussi au besoin les amendes administratives tel que prévu à l’article L. 5421-10-11 code env.). En cas de préjudice (risque de remboursement notamment), la responsabilité de l’État pourra être engagée.

Pour mémoire, en faisant reposer la responsabilité sur les épaules du mandataire, le décret d’application de la loi AGEC partait d’une bonne intention, consistant à faciliter les possibilités de poursuites vis-à-vis de producteurs situés à l’étranger en cas de dysfonctionnement.

De ce fait, désormais, si un producteur établi à l’étranger importe sa production en France, il est seul soumis au régime de la responsabilité élargie du producteur. Dans la mesure où il méconnaitrait ses obligations, l’éco-organisme doit le poursuivre directement et pas son mandataire.

Un mandat simple de représentation demeure possible. De même les cas particuliers ou des groupes ou maisons mères sont désignés mandataires par leurs filiales doivent pouvoir être pris en compte par les eco-organismes, y compris avec une responsabilité solidaire si elle est librement consentie.

2.3. Suites possibles

Une solution serait que le législateur vote une disposition reprenant les termes de l’article R. 541-174 du code de l’environnement, à savoir la possibilité d’un mandat avec subrogation intégrale pour les producteurs, sous réserve de sa conventionnalité et de sa constitutionnalité. Elle ne sera cependant valable que pour l’avenir, sans effets rétroactifs.

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Le Département Infrastructures et Matériaux du Cerema Méditerranée organise une Conférence Technique Territoriale le 12 octobre 2023 :

« Economie circulaire dans le BTP : développements et perspectives sur notre territoire« .

Maitre Rosalie Amabile, responsable du bureau de Marseille du cabinet Altes, y interviendra sur le thème du « Cadre juridique de l’économie circulaire : commande publique et BTP »

Le nombre de places est limité et la conférence aura lieu uniquement en présentiel sur le site d’Aix-en-Provence.

Les inscriptions sont obligatoires et se font par internet via ce lien.

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

Le Club des avocats environnementalistes (CDAE) organise son prochain colloque à la Maison des Avocats le jeudi 28 septembre 2023, autour de la très importante et actuelle thématique de l’eau.

L’eau : entre protection de la ressource et conflits d’usages.

A cette occasion, notre associé Carl Enckell interviendra tout particulièrement sur le sujet de la « Circularité de l’eau : freins et leviers de la réglementation ».

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