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Tous les arrêtés ministériels-types pris en matière d’ICPE sont-ils illégaux ? (suite à la QPC de l’Association France Nature Environnement)

par | 1 Mai 2012

qpc,conseil constitutionnel,fne,mâchefers,arrêtés-typesUne récente question prioritaire de constitutionnalité posée par l’Association FNE et transmise par le Conseil d’Etat au Conseil constitutionnel dans le cadre du recours déposé contre l’arrêté ministériel mâchefers du 18 novembre 2011 pourrait remettre en cause tous les arrêtés ministériels-types pris en matière d’ICPE.

Le motif ? La législation française n’a pas suffisamment bien mis en œuvre les dispositions de la Charte de l’environnement relatives au principe de participation du public (article 7).

En l’occurrence, c’est la procédure d’adoption des arrêtés ministériels-types pris en matière d’ICPE qui est en cause : la simple publication des projets d’arrêtés ne satisferait pas au principe de participation du public (CE, 17 avril 2012, Assoc FNE, req. n° 356349).

Le droit de l’environnement n’est pas fait que de directives européennes  ou de lois. Bien au contraire, s’agissant d’un droit demeurant éminemment technique, les acteurs de l’environnement sont assujettis à des textes réglementaires nourris : décrets, arrêtés ministériels, arrêtés préfectoraux, circulaires, guide technique… et qui fournissent bien du travail aux juristes.

En matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) soumises à autorisation, la loi prévoit que le ministre de l’environnement puisse prendre des arrêtés ministériels « types »qui s’appliqueront à l’ensemble des ICPE relevant d’une rubrique déterminée.

Dans un tel cas, l’exploitant est soumis à la fois à l’arrêté préfectoral délivré sur la base de son dossier de demande et à l’arrêté ministériel type. C’est par exemple le cas de l’arrêté ministériel du 9 septembre 1997 (en cours de révision) pour les installations de stockage de déchets ou de l’arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif aux parcs éoliens.

En pratique, depuis sa version issue de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, l’article L. 512-5 du Code de l’environnement dispose:

« Pour la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 511-1, le ministre chargé des installations classées peut fixer par arrêté, après consultation des ministres intéressés et du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, les règles générales et prescriptions techniques applicables aux installations soumises aux dispositions de la présente section. Ces règles et prescriptions déterminent les mesures propres à prévenir et à réduire les risques d’accident ou de pollution de toute nature susceptibles d’intervenir ainsi que les conditions d’insertion dans l’environnement de l’installation et de remise en état du site après arrêt de l’exploitation. Les projets de règles et prescriptions techniques font l’objet d’une publication, éventuellement par voie électronique, avant leur transmission au Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques.

Ces arrêtés s’imposent de plein droit aux installations nouvelles. Ils précisent, après avis des organisations professionnelles intéressées, les délais et les conditions dans lesquels ils s’appliquent aux installations existantes. Ils fixent également les conditions dans lesquelles certaines de ces règles peuvent être adaptées aux circonstances locales par l’arrêté préfectoral d’autorisation ».

Un projet d’arrêté ministériel type pris pour une catégorie d’ICPE soumises à autorisation doit donc seulement faire l’objet d’une publication, éventuellement par voie électronique, avant d’être soumis pour avis au CSPRT (Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, – ex-CSIC).

Cette  simple formalité de « publication » fait débat car elle ne permet pas en tant que tel de s’assurer d’une véritable participation du public.

Or, en raison de la hiérarchie des normes, le droit national réglementaire et technique doit respecter les textes de rang supérieur, en l’occurrence :

–       l’article 7 de la Charte de l’environnement, qui a valeur constitutionnel

–       mais aussi l’article 8 de la Convention d’Aarhus du 25 juin 1998

C’est dans ce contexte que l’Association FNE a soulevé devant le Conseil d’Etat une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), à l’occasion d’un recours dirigé contre l’arrêté ministériel du 18 novembre 2011 relatif au recyclage des mâchefers.

Le Conseil d’Etat a jugé que la question était pertinente et l’a transmise au Conseil constitutionnel le 17 avril 2012.

En effet, la question répond aux 3 conditions fixées par la loi organique du Conseil constitutionnel : la disposition contestée est applicable au recours engagé contre l’arrêté mâchefers, elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la constitution et elle présente un caractère sérieux.

C’est parfaitement le cas dès lors que le Conseil constitutionnel a déjà jugé anticonstitutionnelles – pour les mêmes motifs – les dispositions du Code de l’environnement relatives aux ICPE soumises à enregistrement, lord d’une décision du 14 octobre 2011 rendue sur une saisine de la même association. Les dispositions contestées sont quasiment les mêmes et les sages ont déjà jugés que « l’existence d’une publication ne suffit pas à assurer la reconnaissance du recueil des observations du public ».

En effet, qu’en est-il de la participation du public dès lors que, par exemple,  la loi ne prévoit pas que ses observations soient consignées ni mêmes recueillies et transmises ?

Mais les conséquences pourraient cette fois-ci s’avérer bien plus catastrophiques pour le Ministère de l’environnement.

Ce sont tous les arrêtés-types pris en matière d’ICPE qui sont en cause, dès lors que la législation est lapidaire sur la participation du public, et qui pourraient par conséquent être déclarés illégaux par effet domino.

La décision du Conseil Constitutionnel est attendue sous 3 mois.

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Le Département Infrastructures et Matériaux du Cerema Méditerranée organise une Conférence Technique Territoriale le 12 octobre 2023 :

« Economie circulaire dans le BTP : développements et perspectives sur notre territoire« .

Maitre Rosalie Amabile, responsable du bureau de Marseille du cabinet Altes, y interviendra sur le thème du « Cadre juridique de l’économie circulaire : commande publique et BTP »

Le nombre de places est limité et la conférence aura lieu uniquement en présentiel sur le site d’Aix-en-Provence.

Les inscriptions sont obligatoires et se font par internet via ce lien.

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

Le Club des avocats environnementalistes (CDAE) organise son prochain colloque à la Maison des Avocats le jeudi 28 septembre 2023, autour de la très importante et actuelle thématique de l’eau.

L’eau : entre protection de la ressource et conflits d’usages.

A cette occasion, notre associé Carl Enckell interviendra tout particulièrement sur le sujet de la « Circularité de l’eau : freins et leviers de la réglementation ».

Inondations : l’État a exagéré les risques (jurisprudence cabinet)

Inondations : l’État a exagéré les risques (jurisprudence cabinet)

Par un jugement du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l’arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 27 juillet 2021 rendant immédiatement opposables certaines prescriptions du projet de Plan de prévention des risques inondation (PPRi) (art. L. 562-2 et R. 562-2 code env.).

I. Contexte

Un PPRi vise à délimiter les zones exposées au risque d’inondation et réglementer l’urbanisation (permis de construire, usage des bâtiments en zone inondable…) (art. L. 562-1 code env.). Selon le niveau de risque, les constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations sont interdits, encadrés ou autorisés.

Le risque peut notamment être lié aux aléas de submersion de cours d’eau et de submersion marine. Ces aléas – de modérés à très forts – sont modélisés selon la hauteur de l’eau ainsi que sa dynamique (rythme d’écoulement et vitesse de montée en cas d’inondation).

La qualification des risques par les services de l’État ayant des conséquences directes sur les droits à construire, des documents méthodologiques de référence ont été élaborés pour garantir son homogénéité sur l’ensemble du territoire (par ex., circulaire du 27 juillet 2011, guide méthodologique de mai 2014). Depuis un décret de 5 juillet 2019 relatif aux « plans de prévention des risques concernant les aléas débordement de cours d’eau et submersion marine », ces recommandations ont une valeur réglementaire.

II. Motifs d’annulation : des risques d’inondation surévalués

En l’espèce, le juge a constaté que la qualification des aléas de débordement de cours d’eau et de submersion marine par les services de l’État excédait les critères prévus par les différents documents de référence précités, ce dont il déduit l’illégalité de l’arrêté rendant ces prescriptions opposables immédiatement.

S’agissant de l’aléa de submersion marine, le juge relève que le rapport de présentation du PPRi n’évoque pas la prise en compte de la dynamique de l’eau (un des critères à prendre en compte avec la hauteur de l’eau). S’agissant de l’aléa de submersion de cours d’eau, le dossier du projet de PPRi ne démontre pas une vitesse de montée des eaux dont il résulterait une dynamique forte (vitesse d’écoulement dépassant rarement 0.50 m/ s).

La cartographie résultant de l’évaluation des aléas étant irrégulière, les projets de constructions situés sur la commune du Barcarès (Pyrénées-Orientales) restent donc soumis à la cartographie précédente des risques (dernier plan approuvé).

Source : TA Montpellier, 5ème chambre, 27 juin 2023 – n° 2106773

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