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Référé administratif et avis défavorable du commissaire enquêteur : gare à la procédure

par | 1 Mai 2012

images.jpgLe Conseil d’Etat vient de décider que le juge administratif, saisi d‘une requête en référé suspension sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative, doit apprécier concrètement et globalement si la condition d’urgence est satisfaite, au regard, notamment, de l’atteinte grave et immédiate à la sécurité publique constituée par l’absence de réalisation de l’opération projetée.

Il ne peut donc pas se contenter de constater que le commissaire enquêteur a formulé un avis défavorable (CE, 24 avril 2012, Société des Autoroutes du Sud de la France, req. n° 355.623).

L’avis défavorable du commissaire enquêteur a des conséquences sur la procédure d’approbation des opérations soumises à enquête publique (ICPE, Parc éolien, projet d’aménagement soumis à déclaration d’utilité publique – DUP).

Ainsi, dans le cas d’opérations ayant une personne publique pour maître d’ouvrage, son organe délibérant doit voter une délibération motivée réitérant la demande d’autorisation ou de déclaration d’utilité publique (C. Env., art. L.123-16).

En cas de recours d’un tiers, l’avis défavorable du commissaire enquêteur n’est pas non plus anodin. En effet, d’après le Code de l’environnement, « le juge administratif des référés, saisi d’une demande de suspension d’une décision prise après des conclusions défavorables du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête, fait droit à cette demande si elle comporte un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de celle-ci. (…) Il fait également droit à toute demande de suspension d’une décision prise sans que l’enquête publique requise par le présent chapitre ait eu lieu » (art. L. 123-16 C. Env., ex. art. L. 123-12).

Ces dispositions sont reprises à l’article L. 554-12 du Code de justice administrative selon lequel la décision de suspension d’une décision d’aménagement soumise à une enquête publique préalable obéit aux règles définies par l’article L. 123-16 du code de l’environnement.

En d’autres termes, en cas d’avis négatif du commissaire enquêteur, il est beaucoup plus facile d’obtenir la suspension d’une décision administrative relative à une opération d’aménagement devant le juge des référés. C’est important s’agissant notamment des DUP.  Dans un tel cas, le juge administratif des référés se contente d’examiner si l’un des moyens de la requête est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué. Il ne peut pas rejeter la requête en retenant l’urgence dans laquelle se trouverait la collectivité publique de voir se réaliser l’ouvrage (v. s’agissant de la demande de suspension de la DUP relative à la liaison autoroutière A6 A46 : CE, juge des référés, 17 décembre 2009, commune de Quincieux et autres, req. n° 333.719)

Cependant, encore faut-il que les requérants introduisent leur action en référé sur le bon texte : le référé spécial enquête publique (art. L. 554-12 CJA) et non pas le référé administratif de droit commun (art. L. 521-1 CJA).

C’est vraisemblablement pour de motif que, dans l’affaire qui vient d’être jugée par le juge des référés du Conseil d’Etat, l’ordonnance de référé du juge de Montpellier suspendant l’opération de création d’une aire d’autoroute sur la A9 a été annulée.

En effet, les requérants n’avaient a priori pas fondée leur action explicitement sur l’article L. 554-12 mais sur l’article L. 521-1 du Code de justice administrative.

Dans un tel cas, deux conditions doivent impérativement être réunies pour obtenir une décision de suspension :

–       la démonstration d’un doute sérieux quant à la légalité de l’acte ;

–       l’urgence.

Comme l’indique le Conseil d’Etat, « il appartient au juge des référés saisi d’une demande de suspension de l’exécution d’une décision administrative d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à porter à sa situation ou à un intérêt public une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue ».

En l’espèce, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ayant déduit de la seule circonstance que le commissaire enquêteur avait donné un avis défavorable à l’opération projetée que la condition d’urgence posée par l’article L. 521-1 était satisfaite a entaché son ordonnance d’erreur de droit, laquelle doit être annulée.

En pratique, les requérants pourraient être tentés de réintroduire un recours en référé, cette fois-ci fondé sur le bon texte… mais le Conseil d’Etat prend soin de les en dissuader en retenant qu’aucun des moyens de leur requête n’est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué.

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Le Département Infrastructures et Matériaux du Cerema Méditerranée organise une Conférence Technique Territoriale le 12 octobre 2023 :

« Economie circulaire dans le BTP : développements et perspectives sur notre territoire« .

Maitre Rosalie Amabile, responsable du bureau de Marseille du cabinet Altes, y interviendra sur le thème du « Cadre juridique de l’économie circulaire : commande publique et BTP »

Le nombre de places est limité et la conférence aura lieu uniquement en présentiel sur le site d’Aix-en-Provence.

Les inscriptions sont obligatoires et se font par internet via ce lien.

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

Le Club des avocats environnementalistes (CDAE) organise son prochain colloque à la Maison des Avocats le jeudi 28 septembre 2023, autour de la très importante et actuelle thématique de l’eau.

L’eau : entre protection de la ressource et conflits d’usages.

A cette occasion, notre associé Carl Enckell interviendra tout particulièrement sur le sujet de la « Circularité de l’eau : freins et leviers de la réglementation ».

Inondations : l’État a exagéré les risques (jurisprudence cabinet)

Inondations : l’État a exagéré les risques (jurisprudence cabinet)

Par un jugement du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l’arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 27 juillet 2021 rendant immédiatement opposables certaines prescriptions du projet de Plan de prévention des risques inondation (PPRi) (art. L. 562-2 et R. 562-2 code env.).

I. Contexte

Un PPRi vise à délimiter les zones exposées au risque d’inondation et réglementer l’urbanisation (permis de construire, usage des bâtiments en zone inondable…) (art. L. 562-1 code env.). Selon le niveau de risque, les constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations sont interdits, encadrés ou autorisés.

Le risque peut notamment être lié aux aléas de submersion de cours d’eau et de submersion marine. Ces aléas – de modérés à très forts – sont modélisés selon la hauteur de l’eau ainsi que sa dynamique (rythme d’écoulement et vitesse de montée en cas d’inondation).

La qualification des risques par les services de l’État ayant des conséquences directes sur les droits à construire, des documents méthodologiques de référence ont été élaborés pour garantir son homogénéité sur l’ensemble du territoire (par ex., circulaire du 27 juillet 2011, guide méthodologique de mai 2014). Depuis un décret de 5 juillet 2019 relatif aux « plans de prévention des risques concernant les aléas débordement de cours d’eau et submersion marine », ces recommandations ont une valeur réglementaire.

II. Motifs d’annulation : des risques d’inondation surévalués

En l’espèce, le juge a constaté que la qualification des aléas de débordement de cours d’eau et de submersion marine par les services de l’État excédait les critères prévus par les différents documents de référence précités, ce dont il déduit l’illégalité de l’arrêté rendant ces prescriptions opposables immédiatement.

S’agissant de l’aléa de submersion marine, le juge relève que le rapport de présentation du PPRi n’évoque pas la prise en compte de la dynamique de l’eau (un des critères à prendre en compte avec la hauteur de l’eau). S’agissant de l’aléa de submersion de cours d’eau, le dossier du projet de PPRi ne démontre pas une vitesse de montée des eaux dont il résulterait une dynamique forte (vitesse d’écoulement dépassant rarement 0.50 m/ s).

La cartographie résultant de l’évaluation des aléas étant irrégulière, les projets de constructions situés sur la commune du Barcarès (Pyrénées-Orientales) restent donc soumis à la cartographie précédente des risques (dernier plan approuvé).

Source : TA Montpellier, 5ème chambre, 27 juin 2023 – n° 2106773

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