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Parcs solaires au sol : l’ensemble des droits acquis par la filière remis en cause par une ordonnance du Conseil d’État (important)

par | 20 Sep 2011

conseil d'état,droits acquis,photovoltaïque,pv,solaire,décret du 19 novembre 2009,permis de construire,alur sncSelon une très récente ordonnance rendue par le juge des référés du Conseil d’état, appuyé par le MEDDTL, le régime du permis de construire s’imposerait rétroactivement à tous les parcs au sol, sans considération des droits acquis (CE, ord. réf, 25 août 2011, société Alur SNC, req. n° 351.811) .

Ainsi, tous les parcs au sol réalisés sous le bénéfice de la déclaration préalable (ou déclaration de travaux) pourraient devoir obtenir un permis de construire.  Cette décision peut entraîner des effets dominos désastreux, pouvant aller jusqu’à la mise en cause de la responsabilité pénale des opérateurs. Ceux-ci ne peuvent plus se fier à la circonstance que le dossier comporte une décision de non-opposition à déclaration préalable pour considérer que le projet n’est pas soumis à permis de construire.

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Une récente ordonnance du juge des référés du Conseil d’État du 25 août 2011 (CE, société Alur SNC, req. n° 351.811) soulève des interrogations juridiques très sérieuses s’agissant de la soumission rétroactive des parcs photovoltaïques au sol au régime du permis de construire.

i Avant le décret du 19 novembre 2009

Jusqu’à la publication du décret du 19 novembre 2009, les parcs photovoltaïques au sol n’étaient pas soumis à permis de construire. Ils pouvaient en revanche relever du régime de la déclaration préalable (ex-déclaration de travaux).

En pratique, le pétitionnaire n’avait qu’à déposer un dossier de déclaration de travaux auprès de l’autorité compétente (généralement le maire) et attendre que celle-ci se prononce. En cas de silence, le projet bénéficiait, au bout d’un mois, d’une décision tacite d’approbation des travaux. De très nombreux parcs photovoltaïques au sol bénéficient de ces décisions administratives tacites, le plus souvent devenues définitives (après affichage sur le terrain).

 ii Après le décret du 19 novembre 2009

Le décret du 19 novembre 2009 est venu bouleverser cet ordonnancement juridique puisqu’il soumet désormais à permis de construire les parcs photovoltaïques au sol auparavant soumis seulement à déclaration préalable.

La question est donc de savoir si les droits acquis avant l’entrée en vigueur de ce nouveau texte sont susceptibles d’être remis en cause ? Une analyse juridique raisonnable permettait de considérer que les décisions obtenues préalablement à la réforme étaient constitutives de droits acquis pour l’exploitant.

Mais une ordonnance du juge des référés du Conseil d’Etat du 25 août 2011 soulève de très sérieuses interrogations à cet égard. En effet, dans cette affaire, le maire de la Commune de Veules-les-Roses avait décidé de suspendre l’exécution de travaux d’un parc photovoltaïque au sol (Arrêté interruptif de travaux) bénéficiant d’une déclaration préalable obtenue avant l’entrée en vigueur du décret du 19 novembre 2009. Le maire a considéré que le nouveau régime juridique s’appliquait rétroactivement et que l’opérateur devait obtenir un permis de construire avant de poursuivre ses travaux.

Saisi d’un recours en référé contre cette décision, le Conseil d’Etat a jugé que les dispositions transitoires du décret du 19 novembre 2009 (article 9) sont rédigées de telle manière qu’un doute peut exister concernant l’application immédiate du nouveau régime juridique aux situations juridiques déjà établies (projets bénéficiant d’une déclaration préalable).

Comment a-ton pu en arriver là ?

En droit : Selon l’article 9 du décret n° 2009-1414 du 19 novembre 2009, ce texte s’applique à partir du 20 décembre 2009. Toutefois, les nouvelles règles en matière d’urbanisme (articles 1er à 3) ne sont pas applicables aux parcs solaires au sol dans deux hypothèses distinctes :

a) Lorsque ces ouvrages comportent des installations ou constructions ayant fait l’objet d’une décision de non-opposition à déclaration préalable ou d’un permis de construire avant l’entrée en vigueur du présent décret ;

b) Lorsque ces ouvrages sont dispensés de toute formalité au titre du code de l’urbanisme et que les travaux ont été entrepris ou achevés à la date de l’entrée en vigueur du présent décret ;

En l’espèce, la société ALUR SNC soutenait qu’elle bénéficiait de l’exemption prévue au a) puisqu’elle bénéficiait d’une décision de non opposition à déclaration préalable.

Mais le Maire de la commune de Veules-les-Roses, et surtout le Ministère de l’Environnement, soutenaient la thèse inverse au vu d’un raisonnement qui mérite qu’on s’y arrêté : Compte tenu de sa nature, l’opération de réalisation d’un parc photovoltaïque au sol, en tant que telle, ne relevait pas du régime des autorisations d’urbanisme avant la réforme de 2009. Il s’en suit que la décision de non opposition à déclaration préalable obtenue est superfétatoire et que l’opérateur ne peut pas se prévaloir du bénéfice de l’exemption prévue au a) du 1° de l’article 9 du décret. Or, pour pouvoir prétendre au bénéfice du b) du 1° de l’article 9 du décret, il faut non seulement que l’ouvrage soit dispensé de toute formalité au titre du code de l’urbanisme (condition satisfaite) mais également que les travaux aient commencés avant le 20 décembre 2009 (date d’entrée en vigueur du décret). Dès lors que cette seconde condition n’est pas satisfaite, le nouveau régime juridique s’applique rétroactivement au projet qui doit obtenir un permis de construire !

Selon le juge des référés du Conseil d’État, « l’ambiguïté des dispositions des a) et b) du 1° de l’article 9 du décret du 19 novembre 2009, tenant à ce que les installations qui étaient dispensées de toute formalité mais qui auraient cependant fait l’objet d’une autorisation pourraient relever du b) par leur nature ou du a) par le fait qu’elles ont fait l’objet d’une autorisation » justifie que le maire ait pris un arrêté interruptif de travaux sans porter atteinte à une liberté fondamentale.

 Les conséquences de cette analyse juridique sont dramatiques pour les opérateurs qui se croient logiquement titulaires d’un droit acquis dès lors qu’ils bénéficient d’une décision de non opposition à déclaration préalable obtenue avant le 20 décembre 2009.

iii Un raisonnement juridique source de responsabilité administrative et pénale pour la filière photovoltaïque

Le raisonnement juridique esquissé dans l’ordonnance du Conseil d’état soulève une question de sécurité juridique essentielle dans la mesure où, à tout moment, un tiers intéressé peut contester la légalité des travaux en réclamant la mise en œuvre de la procédure du permis de construire, précédé d’une étude d’impact et d’une enquête publique, s’agissant des parcs de plus de 250 KWc.

Si ce raisonnement est le bon, les conditions d’exploitation du parc photovoltaïque pourront être remises en cause, notamment la solidité du contrat d’achat d’électricité, puisqu’il aura été octroyé à une installation sans autorisation d’urbanisme en bonne et due forme.

Qu’adviendrait-il si l’Administration se mettait à remettre en cause les contrats de rachat d’électricité pour des parcs photovoltaïques au sol bénéficiant d’une déclaration de travaux et pour lesquels un permis de construire pourrait être exigé rétroactivement ?

Pis encore, si l’opération est soumise rétroactivement à permis de construire alors qu’elle ne bénéficie que d’une déclaration préalable, il faut considérer qu’elle ne bénéficie d’aucune autorisation d’urbanisme en bonne et due forme. Or, dans un tel cas, au-delà du risque administratif, l’opérateur est soumis à un sérieux risque pénal. En effet, si le parc est achevé, les travaux pourront être assimilés à une construction sans permis de construire, ce qui constitue une infraction pénale délictuelle pouvant faire l’objet d’une amende mais aussi d’une injonction de démolition (articles L. 480-4 et L. 480-5 du Code de l’urbanisme).Le délai de prescription pénale de trois ans ne commencera à courir qu’à compter de l’achèvement des travaux.

iv Préconisations juridiques

L’incertitude soulevée par l’ordonnance du Conseil d’Etat du 25 août 2011 demeurera tant que la plus Haute juridiction administrative ne se sera pas prononcée au fond sur le recours en annulation déposé par l’opérateur.

Il s’en déduit que les opérateurs ne doivent pas se fier à la circonstance que le dossier comporte une décision de non-opposition à déclaration préalable pour considérer que le projet n’est pas soumis à permis de construire.

Il est donc très vivement conseillé de vérifier la solidité juridique des projets en s’assurant que ceux-ci ne reposent pas sur des déclarations de travaux superfétatoires, impliquant, par là même, selon le raisonnement défendu par le MEDDTL devant le Conseil d’État, une régularisation rétroactive par l’octroi d’un permis de construire.

Cela implique concrètement un audit du dossier pour déterminer si, en l’état du droit applicable avant le 19 novembre 2009, l’opération relevait du champ des autorisations d’urbanisme (critère de création de surface hors œuvre brute ou de changement de destination des locaux par exemple).

Parc agrivoltaïque : le tribunal administratif de Dijon permet la régularisation du projet

Parc agrivoltaïque : le tribunal administratif de Dijon permet la régularisation du projet

La société Nièvre Agrisolaire a obtenu trois permis de construire, délivrés par arrêtés du préfet de la Nièvre en janvier 2023 pour l’implantation d’une centrale photovoltaïque au sol comprenant modules, quinze postes de transformation, et un poste de livraison.

Saisi d’un recours formé par des associations, le tribunal administratif de Dijon a rendu son jugement le 26 janvier 2024. Il procède à un recensement minutieux des arguments du dossier, notamment l’étude d’impact, établissant la nature agrivoltaïque du projet. Celle-ci résulte de l’association entre des panneaux photovoltaïques et la production de fourrages agricole de haute qualité incluant un séchoir thermovoltaïque.

Le juge reconnait ensuite des fragilités juridiques mais permet la régularisation du projet via la production d’un complément à l’étude d’impact puis un permis modificatif (jugement TA Dijon, 1re ch., 26 janv. 2024, n° 2300854).

Les communes objet du projet n’ayant pas de PLU, c’est le RNU qui s’applique.

1. Reconnaissance de la nature agrivoltaïque du projet

La question de la nature agrivoltaïque du projet relève au moins autant de la législation de l’énergie que de celle de l’urbanisme.

Ainsi, la définition d’une installation agrivoltaïque est désormais inscrite à l’article L. 314-36 du code de l’énergie, résultant de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (dite APER). Parmi d’autres conditions, la production agricole doit être l’activité principale de la parcelle agricole. La consultation publique du projet de décret d’application s’est quant à elle terminée en janvier 2024.

Les permis de construire objets du jugement du tribunal administratif de Dijon le 24 janvier 2024  sont antérieurs à la loi, ce qui peut expliquer pourquoi il ne s’y réfère pas. En revanche, le jugement procède à un recensement minutieux des arguments du dossier, notamment l’étude d’impact, établissant la nature agrivoltaïque du projet. Le juge administratif recourt ainsi en quelque sorte à la technique jurisprudentielle dite du « faisceau d’indices » :

  • le projet implique le remplacement de cultures céréalières et oléo-protéagineuses exploitées sur les parcelles d’assiette par une production fourragère dite « de haute qualité » répondant aux enjeux du plan dit « K végétales » lancé par le ministre de l’agriculture et de l’alimentation à la fin de l’année 2020.
  • la centrale solaire  « sera construite de façon à permettre le maintien d’une activité agricole au sein des parcelles », avec notamment des distances minimales entre les rangs de modules photovoltaïques adaptées à la circulation des engins agricoles.
  • un séchoir thermovoltaïque dimensionné à l’organisation de l’exploitation assurera la production d’un fourrage séché en grange, d’une valeur nutritive notablement supérieure à celle du fourrage en champs et offrant de meilleurs débouchés commerciaux

Le tribunal relève également que « les ouvrages de production d’énergie et le séchoir concourent à la réalisation d’un même projet […] à savoir la construction d’un parc dit « agrivoltaïque », associant à la production d’électricité celle d’un fourrage » (considérant 13).

Enfin, le tribunal juge que le séchoir thermovoltaïque que la société envisage de construire (bâtiment de 80 mètres) concourt à la qualification de projet agrivoltaïque, dans la mesure où il permettra la production d’un fourrage à proximité du siège de l’exploitation, avec un débouché économique pour l’agriculteur.

Au vu de ces éléments, et alors même qu’il implique un changement du type de culture exercé sur le terrain (75 hectares de maïs), il apparait que la production agricole sera significative par rapport à la production d’électricité.

2. Les arguments rejetés par le tribunal

Le juge rejette les moyens avancés par les requérants s’agissant de l’appréciation satisfaisante et proportionnée des incidences du projet sur les paysages et le patrimoine culturel.

Le tribunal a également rejeté le moyen selon lequel l’étude d’impact serait insuffisante du fait du manque d’estimation des émissions attendus (pollution air eau sol sous-sol) puisque les parcelles concernées font déjà l’objet d’une exploitation agricole intensive.

Les moyens relatifs à l’illégalité de l’enquête publique sont également rejetés, ainsi que celui concernant la dérogation espèce protégée, en soulignant que l’obtention de la dérogation conditionne uniquement la mise en œuvre du permis de construire, mais pas sa légalité.

3. Les arguments accueillis par le tribunal

Le juge accueille néanmoins deux des arguments de procédure avancés par les requérants.

Le premier concerne le périmètre de l’étude d’impact (considérant 14). En effet, le juge rappelle que l’article L. 122-1 du code de l’environnement dispose que tout projet constitué de plusieurs interventions dans le milieu naturel doit être évalué dans son ensemble, même en cas de fractionnement dans le temps et l’espace, afin de comprendre ses incidences environnementales globales.

Le tribunal conclut que la construction du séchoir est nécessaire en raison du changement de type de culture induit par le parc photovoltaïque. Ces deux éléments concourent à la réalisation d’un même projet, qualifié d’agrivoltaïque. Par conséquent, l’étude d’impact aurait dû couvrir l’ensemble du projet, y compris la construction du séchoir.

Il estime que l’absence d’analyse des incidences environnementales du séchoir dans l’étude d’impact constitue une insuffisance préjudiciable à l’information complète de la population.

Le second moyen concerne la notion d’ensemble immobilier unique (considérant 49). L’article L. 421-1 du code de l’urbanisme requiert une autorisation de construire pour toute construction, même sans fondations. Selon l’article L. 421-6, la construction d’un ensemble immobilier unique devrait normalement faire l’objet d’une seule autorisation, sauf si l’ampleur et la complexité du projet justifient des permis distincts. Les requérants reprochent à la société Nièvre Agrisolaire de ne pas avoir inclus le séchoir dans ses demandes de permis, bien que celui-ci soit considéré comme essentiel pour maintenir des activités agricoles significatives sur les parcelles du projet.

Le tribunal affirme que le parc photovoltaïque et le séchoir, bien que distincts du point de vue technique et économique, forment un ensemble immobilier unique en raison de leurs liens fonctionnels et de leur impact sur le maintien des activités agricoles.

L’absence de présentation du séchoir dans les demandes de permis rend donc impossible une évaluation globale par l’autorité administrative du respect des règles d’urbanisme et de la protection des intérêts généraux.

4. Conséquences du jugement

Le juge fait usage de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme  et soumet le projet à régularisation pour chacun de ces deux vices, permettant ainsi de sauver le projet. En effet, s’agissant du périmètre de l’étude d’impact, il demande la production d’un complément à celle-ci. Quant à la qualification d’ensemble immobilier unique comprenant le séchoir, un permis modificatif est sollicité.

L’affaire sera donc à nouveau jugée dans quelques mois une fois la procédure de régularisation accomplie.

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

La société EcoDDS, éco-organisme de la filière des déchets diffus spécifiques ménagers, a demandé l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 27 novembre 2020 n°2020-1455 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs (REP), pris pour application de la loi AGEC.

Par une décision du 10 novembre 2023 n° 449213, publié au Journal Officiel n°0264 du 15 novembre 2023, le Conseil d’Etat a confirmé la solidité juridique du régime de la responsabilité élargie du producteur (REP) en apportant certaines précisions utiles (I).

Un des moyens présentés a cependant été retenu par le juge, relatif au mandat de représentation des producteurs (article R. 541-174 du code de l’environnement). Son annulation emporte des conséquences importantes immédiates pour les éco organismes (II).

I. Les dispositions conformes à la loi

La redevance versée à l’ADEME. Elle n’est pas une condition financière préalable au sens de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Les missions de suivi de l’Ademe sont également conformes à la loi AGEC.

La résorption des dépôts sauvages. Il revient au cahier des charges de chaque éco-organisme de prévoir au cas par cas si les coûts de ramassage et de traitement des déchets illégalement abandonnés sont pris en charge. Par ailleurs, ce dispositif ne méconnait pas les dispositions du TFUE relatives aux restrictions quantitatives, ni les objectifs de la directive Déchets s’agissant des couts nécessaires à la gestion des déchets.

Les garanties financières en cas de défaillance. Un dispositif financier a été créé pour garantir la continuité du service des éco-organismes (art R. 541-119 du code de l’environnement). Le terme « défaillance » est interprété de manière large, englobant toutes les situations pouvant compromettre la continuité du service public de gestion des déchets, tels que l’arrêt de l’activité, le non-renouvellement de l’agrément, ou des événements imprévus.

La consultation de l’Autorité de la concurrence n’était pas nécessaire, car les contrats types et l’uniformité des contributions n’entravent pas le libre choix des producteurs en matière de prix ou de conditions de vente.

La possibilité de prendre en charge les frais de mise en place des éco-organismes via les éco-contributions. Le Conseil juge que les frais de mise en place (le plus souvent engagés lors du dossier de candidature à l’agrément) peuvent être couverts par l’écocontribution au même titre que les frais de fonctionnement (considérant 47 de l’arrêt). En pratique, cette prise en charge sera rétroactive, puisque les fais de mise en place sont engagés avant l’agrément des éco-organismes.

Le soutien aux collectivités d’outre-mer. Le principe de planification par les éco-organismes est jugé conforme aux dispositions de la directive Déchets. La planification dans les collectivités d’outre-mer, régies par l’article 73 de la Constitution, sera mise en œuvre dans les cas où leurs performances sont inférieures à la moyenne métropolitaine.

Le barème amont. L’article R. 541-110 du code de l’environnement dispose que le cahier des charges peut détailler les modalités d’application du barème amont défini par la loi (L. 541-10-2 code env.). Le Conseil d’État valide cette disposition, au regard de la procédure transparente d’élaboration de ce barème, qui offre des garanties suffisantes et ne portant pas atteinte au principe de « bon rapport cout-efficacité ».

Par ailleurs, les modalités d’agrément des éco-organismes, la création et la compétence des comités des parties prenantes, la modulation de l’écocontribution, le rôle de l’organisme coordonnateur, les modalités d’autocontrôle sont également jugés conformes à la loi.

II. La disposition contraire à la loi : le mandat de subrogation pour les producteurs (art. R. 541-174 code env.)

2.1. Motifs de l’annulation

La société EcoDDS a obtenu l’annulation du décret en ce qu’il introduit l’article R. 541-174 dans le code de l’environnement. Cet article autorisait tout producteur, indépendamment de son origine, à déléguer à un mandataire la responsabilité « d’assurer le respect des obligations liées au régime de responsabilité élargie des producteurs », cette personne serait « subrogée dans toutes les obligations de responsabilité élargie du producteur » dont il acceptait le mandat.

Le Conseil d’État relève d’abord que la directive Déchets prévoit seulement une possibilité de mandat pour les producteurs qui commercialisent sur le territoire national des produits élaborés dans autre Etat (art. 8bis §5 de la directive). Dans ce cas, le mandataire est chargé d’assurer le respect des obligations qui découlent du régime de la REP.  La directive souligne en outre que les Etats membres peuvent définir d’autres exigences, telles que l’enregistrement l’information et la communication des données qui doivent être remplies par le mandataire, afin de suivre et de vérifier les obligations du producteur établi à l’étranger.

Ensuite, le Conseil d’État relève que la loi AGEC a partiellement transposé ce point de la directive à l’article L. 541-10 du code de l’environnement, sans mention d’un mandat, et en prévoyant simplement, pour les producteurs, l’obligation de « pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ». La loi aborde ensuite la mise en place d’éco-organismes agrées auxquels les producteurs transfèrent leur obligation en contrepartie d’une contribution financière.

Ainsi, d’une part, seul le décret transpose cette disposition de la directive, et, d’autre part, selon des modalités singulièrement différentes. En effet, l’article R. 541-174 du code de l’environnement résultant du décret prévoit que le mandat :

  • est permis à tous les producteurs (produisant en France ou à l’étranger)
  • et qu’il emporte une subrogation intégrale dans les obligations du producteur

Ce qui a une portée beaucoup plus large qu’un simple mandat au sens du droit des obligations (art. 1346 et suivants du code civil). La responsabilité attachée à un mandat classique (articles 1984 et suivants du code civil) est plus limitée. Ainsi, dans le cas du mandat avec subrogation, le mandataire doit répondre des obligations du mandant vis-à-vis des tiers. Par exemple les pénalités contractuelles dues aux éco-organismes. Au contraire, dans le cas du simple mandat, le mandant est responsable des actes du mandataire (la responsabilité du mandataire ne pouvant être engagée envers les tiers que dans le cas où il méconnait le mandat).

Les conclusions du Rapporteur public, Nicolas Agnoux, permettent d’éclairer l’arrêt sur ce point : « Ces dispositions entretiennent ainsi une confusion entre la possibilité, prévue au paragraphe 5 de l’article 8 bis de la directive, de désigner un simple « mandataire » chargé d’agir au nom et pour le compte du producteur, sans transfert de responsabilité, conformément à la définition qu’en donne le code civil (art. 1984 et 1998) et un régime de subrogation entraînant, comme l’indique la deuxième phrase de l’article, un transfert de la responsabilité élargie du producteur. Or cette seconde hypothèse apparaît non seulement contraire à la directive (CE, 13 juillet 2006, 281231) mais également entachée d’incompétence en ce qu’elle régit les obligations civiles des opérateurs ».

Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que le pouvoir règlementaire a excédé sa compétence. L’article R. 541-174 du code de l’environnement est annulé dans son intégralité et immédiatement, sans effet différé.

2.2. Conséquences de l’annulation

Le fondement réglementaire de la subrogation intégrale ayant disparu avec l’annulation de l’article R. 541-174 code env., les mandats passés sont a minima devenus inopposables à l’administration sur ce point (cad les dispositions contractuelles désignant les mandataires des producteurs comme interlocuteurs « exclusif » de l’éco-organisme).

L’annulation emportant en outre des effets rétroactifs, l’article est censé n’avoir jamais existé, ce qui peut nécessiter une reconstitution du passé par l’administration. Cela peut donc également remettre en question les poursuites engagées et les sanctions déjà infligées à des mandataires en lieu et place des producteurs (les pénalités au titre des dispositions contractuelles spécifiques à chaque éco-organisme mais aussi au besoin les amendes administratives tel que prévu à l’article L. 5421-10-11 code env.). En cas de préjudice (risque de remboursement notamment), la responsabilité de l’État pourra être engagée.

Pour mémoire, en faisant reposer la responsabilité sur les épaules du mandataire, le décret d’application de la loi AGEC partait d’une bonne intention, consistant à faciliter les possibilités de poursuites vis-à-vis de producteurs situés à l’étranger en cas de dysfonctionnement.

De ce fait, désormais, si un producteur établi à l’étranger importe sa production en France, il est seul soumis au régime de la responsabilité élargie du producteur. Dans la mesure où il méconnaitrait ses obligations, l’éco-organisme doit le poursuivre directement et pas son mandataire.

Un mandat simple de représentation demeure possible. De même les cas particuliers ou des groupes ou maisons mères sont désignés mandataires par leurs filiales doivent pouvoir être pris en compte par les eco-organismes, y compris avec une responsabilité solidaire si elle est librement consentie.

2.3. Suites possibles

Une solution serait que le législateur vote une disposition reprenant les termes de l’article R. 541-174 du code de l’environnement, à savoir la possibilité d’un mandat avec subrogation intégrale pour les producteurs, sous réserve de sa conventionnalité et de sa constitutionnalité. Elle ne sera cependant valable que pour l’avenir, sans effets rétroactifs.

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

Le Département Infrastructures et Matériaux du Cerema Méditerranée organise une Conférence Technique Territoriale le 12 octobre 2023 :

« Economie circulaire dans le BTP : développements et perspectives sur notre territoire« .

Maitre Rosalie Amabile, responsable du bureau de Marseille du cabinet Altes, y interviendra sur le thème du « Cadre juridique de l’économie circulaire : commande publique et BTP »

Le nombre de places est limité et la conférence aura lieu uniquement en présentiel sur le site d’Aix-en-Provence.

Les inscriptions sont obligatoires et se font par internet via ce lien.

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