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Arrêt du Conseil d’état du 30 décembre 2013 : pas d’avis de tempête pour les éoliennes

par | 3 Jan 2014

Wind-turbine-against-cloud-sky-by-pkorsmok.jpgUn arrêt du Conseil d’Etat du 30 décembre 2013 vient d’être rendu sur la question sensible de la coexistence entre radars météo et parcs éoliens.

Cette décision ne devrait cependant pas faire jurisprudence. En effet, nous sommes d’avis qu’il s’agit d’un arrêt d’espèce et non de principe (CE, 30 décembre 2013, req. n° 352.693).

En l’état des connaissances techniques et scientifiques disponibles, le juge administratif n’est pas en mesure de remettre en cause l’analyse des risques faite par l’administration. Il ne faut donc sans doute pas attendre des tribunaux la remise en cause des règles repoussant l’implantation de parcs éoliens à plus de 10, 20 ou 30 km des radars météo.

Dès lors, l’arrêt du Conseil d’Etat du 30 décembre 2013 ne renforce ni n’assouplit la jurisprudence sur la coexistence entre parcs éoliens et radars.

En revanche, de nouvelles études pourront permettre un assouplissement, qu’elles soient souhaitées par l’administration (étude Qinetic par exemple) ou imposées (nouvelles expertises). Ce sont ces progrès dans la connaissance technique et scientifique du sujet qui permettront de faire évoluer la réglementation applicable et, donc, la jurisprudence, et non l’inverse.

Un arrêt d’espèce

Pour mémoire, un arrêt est d’espèce lorsque la solution qu’il donne ne semble pas devoir être généralisée ou étendue à des cas proches. Au contraire, un arrêt est de principe lorsqu’il comporte une formule générale destinée à s’appliquer à toutes les affaires analogues.

En l’espèce, nous sommes d’avis que du point de vue des acteurs de la filière éolienne, le principal apport de cet arrêt est qu’il ne tranche pas la question de la validité scientifique du rapport d’expertise ayant motivé le désormais célèbre arrêt de la Cour administrative d’appel de Douai du 30 juin 2011. 2011 (CAA Douai, 30 juin 2011, n°09DA01149).

Pour mémoire, dans cette espèce, un expert judiciaire avait remis en cause les conclusions du rapport de la commission consultative de la compatibilité électromagnétique de l’ANFR de 2005, en estimant qu’elles n’étaient pas assez sévères. Suivant les conclusions de l’expert judiciaire, la Cour administrative de Douai avait confirmé un refus de permis de construire un parc éolien en raison du radar météo d’Abbeville.

Or, l’opérateur éolien a fait valoir devant le Conseil d’Etat que l’expert désigné par la cour était partial. Plus précisément, il aurait « publié, le 30 décembre 2009, sur le site internet d’une commune un commentaire très hostile à l’égard des entreprises du secteur éolien et des projets de constructions d’éoliennes ».

Le Conseil d’Etat ne se prononce pas sur ce moyen, qu’il écarte, au motif qu’il implique une appréciation des faits (et non du droit). Or, cet argument ne semble pas avoir été invoqué devant la Cour administrative d’appel, de sorte qu’il n’était plus possible de le faire valoir devant le Conseil d’Etat, en sa qualité de juge de cassation.

Le problème reste donc entier, car l’administration invoque régulièrement cet arrêt de la Cour administrative d’appel de Douai pour refuser l’implantation de parcs éoliens.

Il faudra sans  doute attendre les suites d’autres procédures engagées pour savoir si des experts indépendants remettent en cause ou pas les critères retenus par l’administration pour éloigner les parcs éoliens des radars météo.

Rappelons à ce titre que notre excellent confère David Deharbe nous a permis de prendre connaissance d’un jugement du Tribunal administratif d’Amiens du 10 avril 2012 récusant ce même expert en raison de son manque d’impartialité (TA Amiens, 10 avril 2012, Société Ecotera, n°1200428).

Une expertise semble être attendue dans cette autre procédure et il pourrait en ressortir des éléments intéressants.

Un arrêt qui ne remet pas en cause la possibilité de proposer des solutions innovantes

Contrairement à ce qu’une lecture superficielle de l’arrêt du 30 décembre 2013 pourrait laisser penser, le Conseil d’Etat n’a pas entendu fermer la porte aux solutions alternatives, telles que l’adaptation des radars. En effet, si le Conseil d’Etat relève que la Cour « a également estimé que la société requérante ne pouvait utilement soutenir que les radars utilisés pourraient être adaptés afin de permettre la réalisation de son projet », c’est pour juger que l’arrêt de Douai était suffisamment motivé. Le Conseil d’Etat ne s’est donc à ce titre pas prononcé sur le fond mais sur la forme de l’arrêt d’appel.

Sur le fond de l’arrêt, le Conseil d’Etat exerce un contrôle plus succinct et juge que la Cour administrative d’appel a porté sur les faits soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation, en considérant que les éoliennes perturbent la détection des phénomènes météorologiques « sans réelle possibilité de neutralisation de leurs effets ».

On peut en déduire que, dans ce cas d’espèce, il n’a pas été démontré qu’une adaptation du radar aurait permis de supprimer les effets du parc éolien sur la détection des phénomènes météo. Rien de plus.

En effet, en l’état des connaissances techniques et scientifiques, il paraît difficile d’affirmer que les éoliennes n’apportent aucune perturbation à la détection des phénomènes météorologiques. Ce constat nous renvoi à l’évolution de ces connaissances techniques et scientifiques.

Du reste, la circulaire du 3 mars 2008 relative à la perturbation par les aérogénérateurs du fonctionnement des radars fixes de l’Aviation civile, de la Défense nationale, de Météo France et des ports et navigation maritime et fluviale (PNM) prévoit elle même que certaines techniques telle que l’augmentation de l’élévation de visée du radar dans la direction du parc « au frais du développeur », peut répondre à la problématique des «échos fixes». Ce qui témoigne de l’intérêt de solutions impliquant une adaptation des radars dans certains cas.

Des solutions innovantes en cours

C’est d’ailleurs à ce titre que la DGPR a annoncé en décembre 2013, qu’elle avait contacté, en concertation avec Météo France, la société anglaise Qinetiq pour modéliser les perturbations radar par les éoliennes. L’objectif de l’étude est de valider la méthodologie développée par Qinetiq et permettre de retenir au moins une solution technique satisfaisante pour évaluer les impacts des éoliennes sur le fonctionnement des radars météorologiques. Si la méthode était retenue, ses résultats seraient pris en compte pour délivrer les avis de l’opérateur radar Météo France.

D’autres sujets devront sans doute également être approfondis tels que la pertinence de la surface équivalent radar (SER) de référence de 200 m2 retenue par Météo France pour estimer la taille de la zone d’impact sur la mesure Doppler (CAA Bordeaux, 29 mars 2012, req. n° 1BX00647) ou encore la prise en considération de la technique des pâles furtives.

Le juge administratif examinera sans aucun doute avec beaucoup d’intérêt les résultats de ces études ou de nouveaux rapports d’expertises. Ce sont ces progrès dans la connaissance technique et scientifique du sujet qui permettront de faire évoluer la réglementation applicable et, donc, la jurisprudence, et non l’inverse.

Louis Vuitton : le motif à damier ne constitue pas une marque valable

Louis Vuitton : le motif à damier ne constitue pas une marque valable

Pour être valable, une marque doit être distinctive, c’est-à-dire permettre aux clients de reconnaître les produits ou services proposés sous cette marque, de ceux des autres entreprises.

Si le signe déposé à titre de marque est dépourvu de caractère distinctif en lui-même (par exemple : la marque est trop descriptive), ce caractère distinctif peut être acquis par l’usage. S’agissant d’une marque de l’Union Européenne (UE), cet usage doit avoir lieu au sein de l’UE, être ancien et suffisamment important pour que le signe utilisé soit perçu directement par le consommateur comme étant une marque.

Si ce principe est simple sur un plan théorique, dans la pratique, la preuve de l’existence de ce caractère distinctif acquis par l’usage est difficile à établir, comme l’illustre l’arrêt du Tribunal de l’Union Européenne (TUE), du 12 octobre 2022, qui a refusé de consacrer l’acquisition par l’usage du caractère distinctif de la marque sur le motif à damier de la pourtant célèbre maison Louis Vuitton.

En l’espèce, en 2015, un citoyen polonais avait saisi la division d’annulation de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO, à l’époque OHMI) d’une demande en nullité de la marque de l’UE déposée par Louis Vuitton.

La division d’annulation avait fait droit à la demande en annulant la marque, annulation confirmée par la Chambre des recours, considérant que le motif à damier ne constituait pas un caractère distinctif intrinsèque, ni qu’il avait été acquis par l’usage, dès lors que Louis Vuitton ne rapportait pas la preuve de cette acquisition dans six pays de l’UE (en l’occurrence six pays d’Europe de l’Est). Le TUE a validé ce raisonnement, et ainsi, confirmé l’annulation de la marque de Louis Vuitton.

Il a considéré d’une part, que « le motif à damier est un motif figuratif basique et banal,(…) (il) ne comporte ainsi aucune variation notable par rapport à la représentation conventionnelle de damiers et coïncide avec le modèle traditionnel d’un tel motif », le rendant donc dénué de toute distinctivité intrinsèque et d’autre part, que le caractère distinctif acquis par l’usage de cette marque « doit être démontré dans l’ensemble de ce territoire, et non seulement dans une partie substantielle ou la majorité du territoire de l’Union », ce qui n’est pas le cas ici.

Cette décision n’est pas étonnante, l’EUIPO apprécie de manière très stricte l’acquisition du caractère distinctif d’une marque de l’UE par l’usage.

Source :

TUE, 19 oct. 2022, aff. T-275/21, Louis Vuitton Malletier c./ Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)

Référence de l’image : Marque internationale n°986207 déposée par Louis Vuitton Malletier (Data.inpi.fr)

Déchéance partielle d’une marque : nom patronymique et usage trompeur

Déchéance partielle d’une marque : nom patronymique et usage trompeur

Dans un arrêt du 12 octobre 2022, la Cour d’appel de Paris a prononcé la déchéance partielle de marques patronymiques en raison de l’usage trompeur fait par leur titulaire. La Cour a également jugé que la garantie d’éviction ne rend pas irrecevable la demande reconventionnelle en déchéance par le cédant.

En l’espèce le créateur Jean-Charles Castelbajac avait cédé les marques JC de CASTELBAJAC et JEAN-CHARLES DE CASTELBAJAC à la société PMJC. Cette dernière l’a attaqué pour contrefaçon car le créateur utilise aujourd’hui son nom patronymique pour promouvoir son activité, notamment sur son site internet.

La Cour a jugé que le créateur usait simplement de sa liberté de présenter ses activités sous son nom et avec sa signature et qu’aucun acte de contrefaçon n’était caractérisé.

En revanche, la Cour a partiellement donné raison à monsieur Castelbajac, qui avait formé une demande reconventionnelle en déchéance de ces marques pour usage trompeur. En effet il reprochait entre autres, à la société PMJC d’induire les consommateurs en erreur, en leur faisant croire que les produits commercialisés sous ces deux marques avaient été conçus par lui ou sous sa direction artistique, alors que ce n’était pas le cas.

Si cette décision est en faveur du créateur, la Cour de Cassation pourrait être saisie d’un pourvoi et donner une interprétation différente concernant la déchéance d’une marque patronymique devenue trompeuse du fait de son titulaire.

Cette décision fait écho aux célèbres jurisprudences en la matière : Ines de la Fressange, Cass. com., 31 janv.2006 et Bordas, Cass. com., 12 mars 1985.

Source :

Déchéance partielle de marques composées du nom patronymique d’un créateur en raison de l’usage trompeur par leur cessionnaire | INPI PIBD ;

Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 12/10/22, 20/11628 (M20220269) PMJC SAS c. Jean-Charles C, LouisMarie C et Castelbajac Creative SAS (inpi.fr)

RSE des entreprises : un nouveau code de gouvernement de l’Afep-Medef

RSE des entreprises : un nouveau code de gouvernement de l’Afep-Medef

L’Afep-Medef s’est doté, en décembre 2022, d’un nouveau Code de gouvernance plaçant la stratégie RSE, notamment en matière climatique, au cœur des missions des Conseils d’administration.

La stratégie RSE : une mission essentielle du Conseil d’administration

Le code s’enrichit ainsi d’une nouvelle recommandation, intitulée « Le conseil d’administration et la responsabilité sociale et environnementale ».

Il appartiendra désormais au Conseil d’administration de déterminer les orientations stratégiques pluriannuelles en matière de RSE et à la direction de l’entreprise de présenter les modalités de mise en œuvre de cette stratégie avec un plan d’action et l’horizon de temps dans lequel ces actions seront menées.

Les dirigeants devront informer annuellement le Conseil d’administration des résultats obtenus au dans le cadre de la stratégie RSE préalablement définie.

En matière climatique, cette stratégie devra identifier des objectifs précis, selon des échelles de temps. Les résultats obtenus devront être examinés annuellement par le Conseil d’administration, qui pourra adapter les objectifs et les actions en fonction de l’évolution des technologies et de la situation de l’entreprise ainsi que de ses capacités à mettre en œuvre les mesures préconisées.  

La stratégie et les actions engagées devront être présentés aux actionnaires, au moins tous les trois ans, lors d’une assemblée générale ordinaire.

Assortie d’une formation spécifique aux enjeux climatiques

Afin de faciliter la mise en place d’une stratégie RSE et conformément à la pratique soulignée par l’AMF(Autorité des Marchés Financiers) dans son rapport 2022, le nouveau code de gouvernance Afep-Medef  préconise que ces sujets soient examinés en amont du conseil d’administration, par des comités spécialisés (Comités RSE), dont la composition est librement définie par les entreprises.

De plus, la formation complémentaire des administrateurs à la RSE devra comporter un volet spécifiquement dédié aux enjeux climatiques.

Qui devra être intégrée dans la rémunération des dirigeants

D’après le communiqué de presse de l’Afep-Medef, l’intégration, dans la détermination de la rémunération des dirigeants, de critères RSE précis et reflétant les enjeux sociaux et économiques les plus importants pour l’entreprise constituerait un levier puissant pour porter ces préoccupations au premier plan.

Les critères quantifiables doivent être privilégiés et l’un d’entre eux au moins doit être lié aux objectifs climatiques de l’entreprise.

A titre d’exemple, et comme le souligne l’AMF, l’indicateur quantifiable peut être fondé sur le taux de réduction des émissions carbone résultant de l’activité de la société par employé.

Une simple référence à l’application d’une politique RSE ou à des enjeux généraux est insuffisante.

Et mise en place rapidement

Face aux enjeux et même si ces nouvelles recommandations ne s’appliqueront qu’aux assemblées statuant sur les comptes des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2023 (en pratique les assemblées tenues en 2024), l’Afep et le Medef recommandent aux Conseils d’administration de faire leurs meilleurs efforts pour les appliquer immédiatement.

Sources :

Code de gouvernance Afep-Medef décembre 2022 www.medef.com

Rapport AMF 2022

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