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Dans quel cas le juge administratif peut-il prononcer l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme ?

par | 14 Mar 2013

Onshore-Windpark-Little-Cheyne-Court-UK-.jpgDans un arrêt du 1er mars 2013, le Conseil d’Etat vient de préciser les conditions dans lesquelles le juge peut prononcer l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme (CE, 1er mars 2013, M. et Mme A et autres, req. n°350306).

L’affaire portait sur un permis de construire autorisant la construction d’une éolienne et d’un poste de livraison. Elle permet au Conseil d’Etat de préciser les conditions subtiles dans lesquelles un permis de construire peut être annulé partiellement.

En revanche, il ne saurait être déduit de cette importante jurisprudence (ou des excellentes conclusions du rapporteur public) qu’un permis de construire une éolienne et un poste de livraison serait indivisible.

Compte tenu de la relative complexité de la jurisprudence, il est recommandé aux opérateurs de procéder à un examen préalable de chaque projet (audit de conformité) afin de déterminer, au vu des critères jurisprudentiels et légaux, s’il convient de déposer une demande unique ou des demandes multiples d’autorisations d’urbanisme.

Pour bien comprendre les tenants et aboutissant de cette jurisprudence, je vous invite à lire l’analyse juridique suivante.

 

Dans quel cas le juge administratif peut prononcer l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme ?

Par Anne-Laure Vigneron, Avocate à la Cour – Cabinet Enckell Avocats

Le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 1er mars 2013, vient de préciser les conditions dans lesquelles le juge peut prononcer l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme (CE, 1er mars 2013, M. et Mme A et autres, req. n°350306).

En l’espèce, l’affaire portait sur un permis de construire autorisant la construction d’une éolienne et d’un poste de livraison.

Le Tribunal administratif de Caen avait annulé l’arrêté de permis construire en tant qu’il autorisait la construction du poste de livraison et avait rejeté le surplus de conclusions des requérants contre cet arrêté.

La Cour administrative de Nantes a confirmé le jugement du Tribunal administratif de Caen sur le fondement de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, considérant qu’en dépit du lien fonctionnel existant entre eux, l’éolienne et le poste de livraison constituaient des ouvrages distincts.

Dans son arrêt du 1er mars 2013, le Conseil d’Etat censure cette décision pour erreur de droit. La Haute Assemblée précise qu’une annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme peut être prononcée dans deux hypothèses :

  1ère hypothèse : Lorsque les éléments d’un projet de construction ou d’aménagement ayant une vocation fonctionnelle autonome auraient pu faire, en raison de l’ampleur et la complexité du projet, l’objet d’autorisations distinctes, le juge de l’excès de pouvoir peut prononcer une annulation partielle de l’arrêté attaqué en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux. Le Conseil d’Etat reprend ici, l’hypothèse jurisprudentielle développée dans son arrêt Ville de Grenoble (cf. CE, 17 juin 2009, Commune de Grenoble et Communauté d’agglomération Grenoble Alpes Métropole, req n°301615 sous les conclusions de Julie Burguburu BJDU 4/2009 p. 269 et s.).

  2ème hypothèse : Il résulte des dispositions de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme que le juge peut également procéder à l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme dans le cas où l’illégalité affecte une partie identifiable du projet et où cette illégalité est susceptible d’être régularisée par un arrêté de permis modificatif, sans qu’il soit nécessaire que la partie illégale du projet soit divisible du reste du projet.

Par conséquent, il ressort de ce qui précède que :

 – D’une part, si les critères retenus par la jurisprudence (1ère hypothèse) sont remplis, à savoir si les éléments du projet de construction ou d’aménagement ont une vocation autonome, dès lors qu’ils auraient pu faire, en raison de l’ampleur et de la complexité du projet, l’objet d’autorisations distinctes, dans ce cas l’autorisation d’urbanisme peut faire l’objet d’une annulation partielle en raison de sa divisibilité.

 – D’autre part, si ces conditions ne sont pas satisfaites et notamment si le projet n’est pas caractérisé par son ampleur ou sa complexité (ce qui pourrait être le cas pour un permis portant seulement sur une éolienne et un poste de livraison), ce sont les dispositions de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme qui pourront permettent d’annuler partiellement l’autorisation d’urbanisme.

En effet, comme le relève le Rapporteur public Xavier de Lesquen dans ses conclusions sous l’arrêt du 1er mars 2013, le recours à l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme a un caractère subsidiaire «  il ouvre la possibilité de procéder à une annulation partielle d’une autorisation accordée à un projet qui n’aurait pas pu faire l’objet d’autorisations distinctes. »

Par conséquent, il ressort de l’ensemble de ce qui précède que l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme peut, subsidiairement, permettre d’annuler partiellement une autorisation d’urbanisme alors même que la construction en cause serait indivisible au regard des critères jurisprudentiels.

Toutefois, pour faire application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme deux conditions doivent impérativement être réunies :

  – Une partie du projet de construction doit être illégale ;
  – Cette illégalité doit pouvoir être régularisée par un arrêté modificatif.

En l’espèce, c’est parce que la Cour administrative d’appel de Nantes ne s’est pas assurée de la réunion de ces deux conditions que le Conseil d’Etat a censuré son arrêt pour erreur de droit. En effet, pour apprécier si les conditions prévues par l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme étaient remplies, « la Cour administrative d’appel de Nantes s’est fondée sur la circonstance que l’éolienne et le poste de livraison autorisés par le permis de construire bien que fonctionnellement liés, constituaient deux ouvrages matériellement distincts ».

Or, la Cour aurait d’abord dû rechercher si une partie du projet soumis à autorisation était entachée d’illégalité, puis vérifier si cette illégalité pouvait être régularisée par un arrêté modificatif.

Cet arrêt est donc l’occasion pour le Conseil d’Etat de préciser les conditions d’application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme.

Par conséquent, il ne saurait être déduit de cette importante jurisprudence ou des conclusions du rapporteur public que le Conseil d’Etat aurait refusé de retenir la divisibilité d’un permis de construire une éolienne et un poste de livraison. La Haute Assemblée ne s’est pas penchée sur cette question et a simplement rappelé dans quelles conditions une autorisation d’urbanisme pouvait faire l’objet d’une annulation partielle.

Le Conseil d’Etat n’étant pas juge des faits, il a renvoyé l’affaire devant la Cour administrative d’appel de Nantes qui devra déterminer si l’opération peut faire l’objet d’une annulation partielle conformément aux dispositions de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme.

En définitive, le juge devra d’abord se prononcer sur la divisibilité fonctionnelle ou pas de l’opération attaquée. S’il relève que des éléments de la construction sont divisibles en raison de son ampleur et de sa complexité, il en déduira qu’elle aurait pu faire l’objet d’autorisations distinctes et pourra alors prononcer l’annulation partielle du permis à ce titre (1ère hypothèse).

Dans l’hypothèse inverse, le juge administratif pourra envisager de faire application de l’article L. 600-5 du Code de l’urbanisme à titre subsidiaire. Il devra alors impérativement s’assurer qu’une partie illégale du projet est identifiable et régularisable par un arrêté modificatif. C’est sous cette condition qu’il pourra prononcer l’annulation partielle du permis de construire.

Compte tenu de la relative complexité de la jurisprudence, il est recommandé aux opérateurs de procéder à un examen préalable de chaque projet (audit de conformité) afin de déterminer, au vu des critères jurisprudentiels et légaux, s’il convient de déposer une demande unique ou des demandes multiples d’autorisations d’urbanisme.

L’objectif étant de ne pas encourir une annulation totale alors qu’une partie du parc éolien pourrait être sauvée.

Louis Vuitton : le motif à damier ne constitue pas une marque valable

Louis Vuitton : le motif à damier ne constitue pas une marque valable

Pour être valable, une marque doit être distinctive, c’est-à-dire permettre aux clients de reconnaître les produits ou services proposés sous cette marque, de ceux des autres entreprises.

Si le signe déposé à titre de marque est dépourvu de caractère distinctif en lui-même (par exemple : la marque est trop descriptive), ce caractère distinctif peut être acquis par l’usage. S’agissant d’une marque de l’Union Européenne (UE), cet usage doit avoir lieu au sein de l’UE, être ancien et suffisamment important pour que le signe utilisé soit perçu directement par le consommateur comme étant une marque.

Si ce principe est simple sur un plan théorique, dans la pratique, la preuve de l’existence de ce caractère distinctif acquis par l’usage est difficile à établir, comme l’illustre l’arrêt du Tribunal de l’Union Européenne (TUE), du 12 octobre 2022, qui a refusé de consacrer l’acquisition par l’usage du caractère distinctif de la marque sur le motif à damier de la pourtant célèbre maison Louis Vuitton.

En l’espèce, en 2015, un citoyen polonais avait saisi la division d’annulation de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO, à l’époque OHMI) d’une demande en nullité de la marque de l’UE déposée par Louis Vuitton.

La division d’annulation avait fait droit à la demande en annulant la marque, annulation confirmée par la Chambre des recours, considérant que le motif à damier ne constituait pas un caractère distinctif intrinsèque, ni qu’il avait été acquis par l’usage, dès lors que Louis Vuitton ne rapportait pas la preuve de cette acquisition dans six pays de l’UE (en l’occurrence six pays d’Europe de l’Est). Le TUE a validé ce raisonnement, et ainsi, confirmé l’annulation de la marque de Louis Vuitton.

Il a considéré d’une part, que « le motif à damier est un motif figuratif basique et banal,(…) (il) ne comporte ainsi aucune variation notable par rapport à la représentation conventionnelle de damiers et coïncide avec le modèle traditionnel d’un tel motif », le rendant donc dénué de toute distinctivité intrinsèque et d’autre part, que le caractère distinctif acquis par l’usage de cette marque « doit être démontré dans l’ensemble de ce territoire, et non seulement dans une partie substantielle ou la majorité du territoire de l’Union », ce qui n’est pas le cas ici.

Cette décision n’est pas étonnante, l’EUIPO apprécie de manière très stricte l’acquisition du caractère distinctif d’une marque de l’UE par l’usage.

Source :

TUE, 19 oct. 2022, aff. T-275/21, Louis Vuitton Malletier c./ Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)

Référence de l’image : Marque internationale n°986207 déposée par Louis Vuitton Malletier (Data.inpi.fr)

Déchéance partielle d’une marque : nom patronymique et usage trompeur

Déchéance partielle d’une marque : nom patronymique et usage trompeur

Dans un arrêt du 12 octobre 2022, la Cour d’appel de Paris a prononcé la déchéance partielle de marques patronymiques en raison de l’usage trompeur fait par leur titulaire. La Cour a également jugé que la garantie d’éviction ne rend pas irrecevable la demande reconventionnelle en déchéance par le cédant.

En l’espèce le créateur Jean-Charles Castelbajac avait cédé les marques JC de CASTELBAJAC et JEAN-CHARLES DE CASTELBAJAC à la société PMJC. Cette dernière l’a attaqué pour contrefaçon car le créateur utilise aujourd’hui son nom patronymique pour promouvoir son activité, notamment sur son site internet.

La Cour a jugé que le créateur usait simplement de sa liberté de présenter ses activités sous son nom et avec sa signature et qu’aucun acte de contrefaçon n’était caractérisé.

En revanche, la Cour a partiellement donné raison à monsieur Castelbajac, qui avait formé une demande reconventionnelle en déchéance de ces marques pour usage trompeur. En effet il reprochait entre autres, à la société PMJC d’induire les consommateurs en erreur, en leur faisant croire que les produits commercialisés sous ces deux marques avaient été conçus par lui ou sous sa direction artistique, alors que ce n’était pas le cas.

Si cette décision est en faveur du créateur, la Cour de Cassation pourrait être saisie d’un pourvoi et donner une interprétation différente concernant la déchéance d’une marque patronymique devenue trompeuse du fait de son titulaire.

Cette décision fait écho aux célèbres jurisprudences en la matière : Ines de la Fressange, Cass. com., 31 janv.2006 et Bordas, Cass. com., 12 mars 1985.

Source :

Déchéance partielle de marques composées du nom patronymique d’un créateur en raison de l’usage trompeur par leur cessionnaire | INPI PIBD ;

Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 12/10/22, 20/11628 (M20220269) PMJC SAS c. Jean-Charles C, LouisMarie C et Castelbajac Creative SAS (inpi.fr)

RSE des entreprises : un nouveau code de gouvernement de l’Afep-Medef

RSE des entreprises : un nouveau code de gouvernement de l’Afep-Medef

L’Afep-Medef s’est doté, en décembre 2022, d’un nouveau Code de gouvernance plaçant la stratégie RSE, notamment en matière climatique, au cœur des missions des Conseils d’administration.

La stratégie RSE : une mission essentielle du Conseil d’administration

Le code s’enrichit ainsi d’une nouvelle recommandation, intitulée « Le conseil d’administration et la responsabilité sociale et environnementale ».

Il appartiendra désormais au Conseil d’administration de déterminer les orientations stratégiques pluriannuelles en matière de RSE et à la direction de l’entreprise de présenter les modalités de mise en œuvre de cette stratégie avec un plan d’action et l’horizon de temps dans lequel ces actions seront menées.

Les dirigeants devront informer annuellement le Conseil d’administration des résultats obtenus au dans le cadre de la stratégie RSE préalablement définie.

En matière climatique, cette stratégie devra identifier des objectifs précis, selon des échelles de temps. Les résultats obtenus devront être examinés annuellement par le Conseil d’administration, qui pourra adapter les objectifs et les actions en fonction de l’évolution des technologies et de la situation de l’entreprise ainsi que de ses capacités à mettre en œuvre les mesures préconisées.  

La stratégie et les actions engagées devront être présentés aux actionnaires, au moins tous les trois ans, lors d’une assemblée générale ordinaire.

Assortie d’une formation spécifique aux enjeux climatiques

Afin de faciliter la mise en place d’une stratégie RSE et conformément à la pratique soulignée par l’AMF(Autorité des Marchés Financiers) dans son rapport 2022, le nouveau code de gouvernance Afep-Medef  préconise que ces sujets soient examinés en amont du conseil d’administration, par des comités spécialisés (Comités RSE), dont la composition est librement définie par les entreprises.

De plus, la formation complémentaire des administrateurs à la RSE devra comporter un volet spécifiquement dédié aux enjeux climatiques.

Qui devra être intégrée dans la rémunération des dirigeants

D’après le communiqué de presse de l’Afep-Medef, l’intégration, dans la détermination de la rémunération des dirigeants, de critères RSE précis et reflétant les enjeux sociaux et économiques les plus importants pour l’entreprise constituerait un levier puissant pour porter ces préoccupations au premier plan.

Les critères quantifiables doivent être privilégiés et l’un d’entre eux au moins doit être lié aux objectifs climatiques de l’entreprise.

A titre d’exemple, et comme le souligne l’AMF, l’indicateur quantifiable peut être fondé sur le taux de réduction des émissions carbone résultant de l’activité de la société par employé.

Une simple référence à l’application d’une politique RSE ou à des enjeux généraux est insuffisante.

Et mise en place rapidement

Face aux enjeux et même si ces nouvelles recommandations ne s’appliqueront qu’aux assemblées statuant sur les comptes des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2023 (en pratique les assemblées tenues en 2024), l’Afep et le Medef recommandent aux Conseils d’administration de faire leurs meilleurs efforts pour les appliquer immédiatement.

Sources :

Code de gouvernance Afep-Medef décembre 2022 www.medef.com

Rapport AMF 2022

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