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Éoliennes et radars : Les guides de l’ANFR s’imposent si les refus de permis de construire sont assortis de justifications précises

par | 11 Juil 2011

éoliennes,radar,anfr,effet dopplerDeux récents arrêts de la Cour administrative d’appel de Douai du 30 juin 2011 viennent de compléter la jurisprudence, à présent assez abondante, relative à la coexistence entre éoliennes et radars. Ils confèrent une véritable force juridique aux guides et rapports de l’Agence nationale des fréquences (ANFR) sur les éoliennes et les radars.

En définitive, les préconisations de l’ANFR peuvent imposer des quasi-servitudes, si elles sont assorties de précisions suffisantes.


1. MEDDTL c/ SOCIETE FRANCAISE D’EOLIENNES : pas d’interdiction sans justification précise

La Cour administrative d’appel de Douai confirme d’abord l’annulation d’un refus de permis de construire opposé par le préfet de Seine Maritime à un parc éolien (CAA Douai, 30 Juin 2011, MEDDTL c/ SOCIETE FRANCAISE D’EOLIENNES, req. n° 10DA00387).

Les deux motifs de refus du préfet sont jugés illégaux.

a. Risque d’atteinte à la sécurité publique (R. 111-2 du Code de l’urbanisme ? Non

Selon cet arrêt, le juge confère une certaine force juridique au rapport de l’Agence nationale des fréquences (ANFR) du 2 mai 2006 sur les éoliennes et les radars.

En revanche, le Ministre de l’environnement (et ses services) doit apporter la preuve de ce qu’il affirme lorsqu’il invoque un rapport de l’ANFR.

En effet, dans cette première affaire, la Cour relève que le préfet a refusé le permis en invoquant  « les perturbations susceptibles d’être engendrées par les éoliennes sur le fonctionnement du radar basse altitude dont l’installation avait été décidée à une douzaine de kilomètres de distance environ, afin de surveiller les approches aériennes des sites des centrales nucléaires de Penly et Paluel ».

Elle ajoute cependant que le rapport de l’Agence nationale des fréquences du 2 mai 2006 ne préconise une interdiction totale d’implantation d’éoliennes que dans un rayon de 5 kilomètres autour des radars de surveillance aérienne. S’agissant de la zone d’exclusion comprise entre 5 et 20 kilomètres, elle n’est opposable que sous certaines conditions non démontrées en l’espèce en raison d’un avis trop imprécis du MEEDDM (actuel MEDDTL).

Qu’en aurait-il été si l’étude produite par le Ministre avait été plus précise ? Le refus aurait vraisemblablement été jugé légal.

La Cour relève également que la « zone d’exclusion d’un radar de surveillance aérienne » au sein de laquelle se trouverait le parc éolien en cause n’est démontré par aucune pièce du dossier. En d’autres termes, le ministre aurait du apporter la preuve de ce qu’il affirme, faute de quoi ses arguments sont jugés imprécis.

b. Risque d’atteinte aux sites (R. 111-21 et R. 111-14-1 du Code de l’urbanisme) : NON

La Cour confirme à ce titre le rôle essentiel de l’étude d’impact.

En effet, elle juge que la présence d’un parc éolien (8 éoliennes en l’espèce) d’une hauteur, pales comprises, de 122 mètres, situé sur une ligne de crête, « à proximité immédiate d’un environnement de très grande qualité », modifie incontestablement l’aspect du paysage.

Pour autant, selon la Cour, le préfet n’aurait pas du refuser le permis dès lors que l’étude d’impact démontre que les distances et la topographie des lieux combinées avec des perspectives largement ouvertes et partiellement urbanisées atténueront fortement la perception des éoliennes dans ce paysage.

http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000024315667&fastReqId=1052480520&fastPos=1

 

2. MEDDTL c/ Société des énergies des Vents: L’effet doppler empêche le parc éolien

Dans une seconde affaire, en revanche, la Cour juge que le préfet de la Somme a légalement pu rejeter une demande de permis de construire un parc éolien pour des motifs de sécurité publique (CAA Douai, 30 mai 2011, Société des énergies des Vents, req. n° 09DA01166).

a. Tout d’abord, la zone de coordination, comprise entre 5 et 20 kilomètres autour du lieu d’implantation d’un radar fonctionnant en mode doppler, préconisée par l’ANFR, a une force juridique qui s’impose aux parcs éoliens (risques de création d’échos parasites affectant les données recueillies par mode Doppler).

Le juge confère également une certaine force juridique aux rapports et guide de la commission consultative de la compatibilité électromagnétique de l’Agence nationale des fréquences (rapport CCE5 n° 1 du 19 septembre 2005 et guide du 3 juillet 2007), s’agissant de la zone d’impact du Doppler.

Le guide prévoit les conditions destinées à ce que l’exploitant d’un radar météorologique puisse s’assurer que la taille de la zone de perturbation engendrée par les éoliennes ne soit pas supérieure, dans sa plus grande dimension, à 10 kilomètres, ou qu’elle ne se situe pas à moins de 10 kilomètres d’une autre zone de perturbation.

Or, selon Météo France, la surface équivalent radar des éoliennes projetées était de l’ordre de 200 m², de sorte que :

– les aérogénérateurs auraient été susceptibles d’engendrer une zone de perturbation maximum de 12 km² dans le périmètre de sensibilité du radar Météo-France d’Abbeville

– la zone d’impact du Doppler était distante de moins de 10 kilomètres de celle des autres parcs existants

b. De son côté, la société des énergies des vents n’a contesté ces affirmations précises que « par des considérations générales », de sorte que le refus de permis de construire était justifié, selon la Cour.

Le demandeur du permis de construire doit donc apporter la preuve de ce qu’il affirme lorsqu’il conteste la pertinence des surface équivalent radar retenue par Météo France ou la distance par rapport à la zone de perturbation générée par les aérogénérateurs.

La Cour prend soin de préciser que la zone de coordination, comprise entre 5 et 20 kilomètres autour du lieu d’implantation d’un radar fonctionnant en mode doppler, préconisée par l’ANFR, n’a pas pour but de créer une servitude mais de veiller à ce que les perturbations induites par l’implantation d’aérogénérateurs ne se cumulent pas afin de générer une gêne plus importante.

En pratique, nous considérerons tout de même que les préconisations de l’ANFR (autorité qui n’a pas légalement à être consultée au titre de l’instruction d’un permis de construire un parc éolien) peuvent équivaloir à de quasi-servitudes si elles sont assorties de précisions suffisantes.

http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000024315663&fastReqId=32784196&fastPos=1

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

Eco-organismes : le Conseil d’État annule partiellement le décret portant réforme de la REP

La société EcoDDS, éco-organisme de la filière des déchets diffus spécifiques ménagers, a demandé l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 27 novembre 2020 n°2020-1455 portant réforme de la responsabilité élargie des producteurs (REP), pris pour application de la loi AGEC.

Par une décision du 10 novembre 2023 n° 449213, publié au Journal Officiel n°0264 du 15 novembre 2023, le Conseil d’Etat a confirmé la solidité juridique du régime de la responsabilité élargie du producteur (REP) en apportant certaines précisions utiles (I).

Un des moyens présentés a cependant été retenu par le juge, relatif au mandat de représentation des producteurs (article R. 541-174 du code de l’environnement). Son annulation emporte des conséquences importantes immédiates pour les éco organismes (II).

I. Les dispositions conformes à la loi

La redevance versée à l’ADEME. Elle n’est pas une condition financière préalable au sens de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Les missions de suivi de l’Ademe sont également conformes à la loi AGEC.

La résorption des dépôts sauvages. Il revient au cahier des charges de chaque éco-organisme de prévoir au cas par cas si les coûts de ramassage et de traitement des déchets illégalement abandonnés sont pris en charge. Par ailleurs, ce dispositif ne méconnait pas les dispositions du TFUE relatives aux restrictions quantitatives, ni les objectifs de la directive Déchets s’agissant des couts nécessaires à la gestion des déchets.

Les garanties financières en cas de défaillance. Un dispositif financier a été créé pour garantir la continuité du service des éco-organismes (art R. 541-119 du code de l’environnement). Le terme « défaillance » est interprété de manière large, englobant toutes les situations pouvant compromettre la continuité du service public de gestion des déchets, tels que l’arrêt de l’activité, le non-renouvellement de l’agrément, ou des événements imprévus.

La consultation de l’Autorité de la concurrence n’était pas nécessaire, car les contrats types et l’uniformité des contributions n’entravent pas le libre choix des producteurs en matière de prix ou de conditions de vente.

La possibilité de prendre en charge les frais de mise en place des éco-organismes via les éco-contributions. Le Conseil juge que les frais de mise en place (le plus souvent engagés lors du dossier de candidature à l’agrément) peuvent être couverts par l’écocontribution au même titre que les frais de fonctionnement (considérant 47 de l’arrêt). En pratique, cette prise en charge sera rétroactive, puisque les fais de mise en place sont engagés avant l’agrément des éco-organismes.

Le soutien aux collectivités d’outre-mer. Le principe de planification par les éco-organismes est jugé conforme aux dispositions de la directive Déchets. La planification dans les collectivités d’outre-mer, régies par l’article 73 de la Constitution, sera mise en œuvre dans les cas où leurs performances sont inférieures à la moyenne métropolitaine.

Le barème amont. L’article R. 541-110 du code de l’environnement dispose que le cahier des charges peut détailler les modalités d’application du barème amont défini par la loi (L. 541-10-2 code env.). Le Conseil d’État valide cette disposition, au regard de la procédure transparente d’élaboration de ce barème, qui offre des garanties suffisantes et ne portant pas atteinte au principe de « bon rapport cout-efficacité ».

Par ailleurs, les modalités d’agrément des éco-organismes, la création et la compétence des comités des parties prenantes, la modulation de l’écocontribution, le rôle de l’organisme coordonnateur, les modalités d’autocontrôle sont également jugés conformes à la loi.

II. La disposition contraire à la loi : le mandat de subrogation pour les producteurs (art. R. 541-174 code env.)

2.1. Motifs de l’annulation

La société EcoDDS a obtenu l’annulation du décret en ce qu’il introduit l’article R. 541-174 dans le code de l’environnement. Cet article autorisait tout producteur, indépendamment de son origine, à déléguer à un mandataire la responsabilité « d’assurer le respect des obligations liées au régime de responsabilité élargie des producteurs », cette personne serait « subrogée dans toutes les obligations de responsabilité élargie du producteur » dont il acceptait le mandat.

Le Conseil d’État relève d’abord que la directive Déchets prévoit seulement une possibilité de mandat pour les producteurs qui commercialisent sur le territoire national des produits élaborés dans autre Etat (art. 8bis §5 de la directive). Dans ce cas, le mandataire est chargé d’assurer le respect des obligations qui découlent du régime de la REP.  La directive souligne en outre que les Etats membres peuvent définir d’autres exigences, telles que l’enregistrement l’information et la communication des données qui doivent être remplies par le mandataire, afin de suivre et de vérifier les obligations du producteur établi à l’étranger.

Ensuite, le Conseil d’État relève que la loi AGEC a partiellement transposé ce point de la directive à l’article L. 541-10 du code de l’environnement, sans mention d’un mandat, et en prévoyant simplement, pour les producteurs, l’obligation de « pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ». La loi aborde ensuite la mise en place d’éco-organismes agrées auxquels les producteurs transfèrent leur obligation en contrepartie d’une contribution financière.

Ainsi, d’une part, seul le décret transpose cette disposition de la directive, et, d’autre part, selon des modalités singulièrement différentes. En effet, l’article R. 541-174 du code de l’environnement résultant du décret prévoit que le mandat :

  • est permis à tous les producteurs (produisant en France ou à l’étranger)
  • et qu’il emporte une subrogation intégrale dans les obligations du producteur

Ce qui a une portée beaucoup plus large qu’un simple mandat au sens du droit des obligations (art. 1346 et suivants du code civil). La responsabilité attachée à un mandat classique (articles 1984 et suivants du code civil) est plus limitée. Ainsi, dans le cas du mandat avec subrogation, le mandataire doit répondre des obligations du mandant vis-à-vis des tiers. Par exemple les pénalités contractuelles dues aux éco-organismes. Au contraire, dans le cas du simple mandat, le mandant est responsable des actes du mandataire (la responsabilité du mandataire ne pouvant être engagée envers les tiers que dans le cas où il méconnait le mandat).

Les conclusions du Rapporteur public, Nicolas Agnoux, permettent d’éclairer l’arrêt sur ce point : « Ces dispositions entretiennent ainsi une confusion entre la possibilité, prévue au paragraphe 5 de l’article 8 bis de la directive, de désigner un simple « mandataire » chargé d’agir au nom et pour le compte du producteur, sans transfert de responsabilité, conformément à la définition qu’en donne le code civil (art. 1984 et 1998) et un régime de subrogation entraînant, comme l’indique la deuxième phrase de l’article, un transfert de la responsabilité élargie du producteur. Or cette seconde hypothèse apparaît non seulement contraire à la directive (CE, 13 juillet 2006, 281231) mais également entachée d’incompétence en ce qu’elle régit les obligations civiles des opérateurs ».

Pour ces raisons, le Conseil d’État juge que le pouvoir règlementaire a excédé sa compétence. L’article R. 541-174 du code de l’environnement est annulé dans son intégralité et immédiatement, sans effet différé.

2.2. Conséquences de l’annulation

Le fondement réglementaire de la subrogation intégrale ayant disparu avec l’annulation de l’article R. 541-174 code env., les mandats passés sont a minima devenus inopposables à l’administration sur ce point (cad les dispositions contractuelles désignant les mandataires des producteurs comme interlocuteurs « exclusif » de l’éco-organisme).

L’annulation emportant en outre des effets rétroactifs, l’article est censé n’avoir jamais existé, ce qui peut nécessiter une reconstitution du passé par l’administration. Cela peut donc également remettre en question les poursuites engagées et les sanctions déjà infligées à des mandataires en lieu et place des producteurs (les pénalités au titre des dispositions contractuelles spécifiques à chaque éco-organisme mais aussi au besoin les amendes administratives tel que prévu à l’article L. 5421-10-11 code env.). En cas de préjudice (risque de remboursement notamment), la responsabilité de l’État pourra être engagée.

Pour mémoire, en faisant reposer la responsabilité sur les épaules du mandataire, le décret d’application de la loi AGEC partait d’une bonne intention, consistant à faciliter les possibilités de poursuites vis-à-vis de producteurs situés à l’étranger en cas de dysfonctionnement.

De ce fait, désormais, si un producteur établi à l’étranger importe sa production en France, il est seul soumis au régime de la responsabilité élargie du producteur. Dans la mesure où il méconnaitrait ses obligations, l’éco-organisme doit le poursuivre directement et pas son mandataire.

Un mandat simple de représentation demeure possible. De même les cas particuliers ou des groupes ou maisons mères sont désignés mandataires par leurs filiales doivent pouvoir être pris en compte par les eco-organismes, y compris avec une responsabilité solidaire si elle est librement consentie.

2.3. Suites possibles

Une solution serait que le législateur vote une disposition reprenant les termes de l’article R. 541-174 du code de l’environnement, à savoir la possibilité d’un mandat avec subrogation intégrale pour les producteurs, sous réserve de sa conventionnalité et de sa constitutionnalité. Elle ne sera cependant valable que pour l’avenir, sans effets rétroactifs.

Save the date – Conférence du CEREMA : « Économie circulaire dans le BTP »

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Le Département Infrastructures et Matériaux du Cerema Méditerranée organise une Conférence Technique Territoriale le 12 octobre 2023 :

« Economie circulaire dans le BTP : développements et perspectives sur notre territoire« .

Maitre Rosalie Amabile, responsable du bureau de Marseille du cabinet Altes, y interviendra sur le thème du « Cadre juridique de l’économie circulaire : commande publique et BTP »

Le nombre de places est limité et la conférence aura lieu uniquement en présentiel sur le site d’Aix-en-Provence.

Les inscriptions sont obligatoires et se font par internet via ce lien.

Save the date – Colloque « Eau » du Club des avocats environnementalistes

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Le Club des avocats environnementalistes (CDAE) organise son prochain colloque à la Maison des Avocats le jeudi 28 septembre 2023, autour de la très importante et actuelle thématique de l’eau.

L’eau : entre protection de la ressource et conflits d’usages.

A cette occasion, notre associé Carl Enckell interviendra tout particulièrement sur le sujet de la « Circularité de l’eau : freins et leviers de la réglementation ».

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